Profitez des offres Memoirevive.ch!
Enseigner, oui mais comment et à qui ?
Durant huit ans, j'ai exercé, outre mon métier de conseillère juridique, notamment la fonction de formatrice d'adultes pour le compte d'un employeur totalisant environ 3'500 collaborateurs dans le très vaste domaine que constitue le secteur médico-social.

Lors des premiers cours que j'ai donnés, j'ai eu devant moi un public presque tétanisé à l'idée de "faire du droit", pas très enthousiaste à la perspective de passer une matinée avec une juriste. Puis, au fil du temps, le bouche à oreille étant la meilleure publicité du monde, j'ai vu l'attitude des participantes se modifier, certaines allant jusqu'à affirmer "ma copine m'a dit que votre cours était super, je me réjouis de vous entendre" en guise de réponse à ma question "comment vous sentez-vous au début de ce cours de droit (du travail) ?"

J'ai ainsi vu défiler différents professionnels, certains ne disposant que d'un certificat obtenu après 120 heures de formation, tandis que d'autres étaient au bénéfice d'un titre supérieur HES : ainsi, le but de mes interventions était d'offrir des premières connaissances juridiques, de rafraîchir des notions parfois oubliées ou encore de faire le point sur une nouvelle législation, toujours dans le but de garantir des prestations à l'usager aussi adéquates et respectueuses que possible, tant de la personne que du droit.

J'ai toujours trouvé énormément d'intérêt à ces cours, d'une part parce que je suis convaincue qu'un professionnel qui connaît mieux les contours du droit adopte une meilleure posture professionnelle, d'autre part parce que cela m'a permis de découvrir et de me plonger dans des secteurs d'activités fort éloignés à la base du mien : ainsi, je me suis penchée sur des questions très diverses, liées à l'âge avancé mais aussi à la problématique de la vaccination HPV. En effet, je suis d'avis que pour retenir l'attention d'un collaborateur, il faut que la matière lui "parle", qu'il puisse voir les liens, les implications entre son quotidien et l'article de loi dont il est question : l'ex-cathedra juridique à la sauce université, franchement, je crois qu'il aurait manqué sa cible.

Depuis le 1er septembre 2012, j'ai quitté le "terrain" pour travailler exclusivement en HES (haute école spécialisée, pour qui ne serait pas familier du système suisse). Cette école, comme toutes ses "soeurs", forme (en bachelor et master) des jeunes qui ont, à leur arrivée, à tout le moins 19, voire 20 ans : on est donc loin des 45 ans (et plus) de mes élèves précédents, tous très largement adultes !

Je me trouve donc confrontée à la difficulté de ne pouvoir raccrocher mes enseignements à... (presque) rien, le vécu des élèves étant, dans certaines matières, trop "bref" pour être réellement aidant. Et les exemples, c'est bien mais je sens régulièrement que ça ne leur parle pas (encore) vraiment.

Et franchement, je trouve ça atrocement frustrant : à l'âge de "mes" élèves, on a forcément (et heureusement) des élans, des convictions très fortes et lorsque je parle "assurances sociales", ils sont surtout en révolte contre le système tel qu'il existe dans notre pays (conditions d'accès, aspect modeste des montants alloués etc). Si je peux être d'accord avec eux, je suis en premier lieu là pour leur apprendre le fonctionnement de cette construction très complexe qu'est la sécurité sociale helvétique sur le plan juridique : de cette maîtrise va partiellement dépendre le bien-fondé de leurs interventions auprès de leurs futurs "clients".

Les rares fois où j'enseigne le droit du travail, je constate un regain d'intérêt : (presque) tous ont eu un job d'été, voire un emploi régulier, et je vois bien que certaines notions, pour avoir été vécues, prennent un autre relief. Ainsi, rares sont ceux qui n'ont jamais fait d'heures supplémentaires pour leur employeur, rares sont ceux qui n'ont jamais entendu parler de licenciement dans leur entourage. En revanche, la notion d'atteinte durable à l'intégrité (art. 24 LAA), elle, est forcément (et heureusement, sur le principe) moins parlante.

Je suis donc très ambivalente : d'un côté, j'aime le contact avec des professionnels aguerris en prise directe avec le terrain, dont j'ai l'impression qu'ils pourront faire un usage direct et réel de mes enseignements juridiques; de l'autre, je me dis qu'enseigner le droit à des jeunes, c'est la possibilité de leur donner un outil (parmi beaucoup d'autres, qu'on soit bien d'accord) pour décoder le monde, les enjeux de certaines votations, les conséquences de certains choix de société.

Finalement, ce qui me pèse aussi beaucoup, c'est d'être (presque) la seule juriste dans ce monde composé d'enseignants sociologues, ethnologues, psychologues ou travailleurs sociaux.... Le regard que nous portons sur le "monde" est différent et pourrait être complémentaire s'il n'y avait cette barrière du vocabulaire, des termes. A des mots identiques, nous donnons parfois des sens différents; pour certains de mes collègues, du bon usage des vocables est central tandis qu'en bonne juriste, j'ai fait mien l'adage "peu importe le terme, tant que l'intention des parties est commune"; moralité, il m'arrive d'avoir l'impression de ne pas comprendre les autres profs et de ne pas être comprise non plus d'ailleurs !

Bref, vous l'aurez deviné, je nage en pleines frustrations professionnelles ces derniers temps et je dois bien l'admettre, si vous acceptiez de me parler des vôtres, je me sentirais un peu moins seule : alors, dites-moi (presque) tout ! Si en plus, vous avez la recette pour sortir de vos impasses, je serais ravie !

14 commentaires
1)
Roger Baudet
, le 25.02.2013 à 09:05

Ayant moi-même été élève dans une école sociale et ayant reçu des cours de droit, je peux comprendre ton désarroi, car le milieu médico-socio pédagogique est plutôt fermé. La solution? Je ne l’ai pas. Le jargon et les attitudes des personnes travaillant dans ce milieu sont souvent une façade pour cacher une certaine fragilité et quelques fois une grande humanité. Si cela peut te servir…

2)
guru
, le 25.02.2013 à 09:33

Es-tu tenue à un programme imposé par les autorités. Je le suppose car sinon il serait tellement plus efficace de leur donner les armes spécifiquement utiles dans la suite de leur carrière. Le droit pour le droit, ça n’intéresse que ceux qui aiment ça, tandis que le droit pour se défendre, pour se faire respecter, c’est plus parlant.

Mais après plus de 40 ans d’enseignement dans une haute école, j’ai vu s’émousser la curiosité pour tout ce qui n’est pas l’objet primaire des études. Mes étudiants en cinéma ne se rendaient pas toujours compte que les notions de base de la prise de son risquaient de leur être sacrément utiles un jour; alors imagine leurs réactions pour les cours de droit qui étaient obligatoires. Je suppose que c’est pareil pour tes étudiants en Suisse.

Mme Guru, qui a aussi quelques années de vol dans l’enseignement à des adultes, a rencontré les mêmes difficultés qu’elle a plus ou moins résolues en étant une “grande comédienne” et en faisant un numéro de haut vol à chaque leçon. Quel investissement et quelle fatigue.

Mais que tu te poses ces questions suffit à m’indiquer qu’elles seront bientôt résolues… Bon courage, jusqu’à la quille !

3)
Ellipse
, le 25.02.2013 à 10:26

C’est un métier fait de hauts et de bas.

Comme tu as pu le constater, tes étudiant(e)s (que je considère comme “adultes”) sont passionné(e)s dès que cela les concerne. C’est une bonne piste à exploiter, pour rebondir de temps en temps, trouver un angle d’attaque qui les concerne, même pour les assurances sociales (ils doivent bien avoir des parents, des grands-parents, connaître des gens ayant eu des histoires avec cela).

Il y a aussi une approche intéressante : leur donner la théorie à étudier chez eux, puis discutez des cas pratiques s’y rapportant durant les cours.

Et parfois, il n’y a rien d’autres à faire que d’enseigner des notions de base, même barbantes à première vue, la difficulté étant des les faire passer, de donner des anecdotes parlantes. En physique, par exemple, je leur explique que sans l’indication et la maîtrise des unités, on peut perdre de l’argent, beaucoup d’argent comme lorsque la NASA perd une sonde ou, plus grave, causer la mort, à cause de surdose accidentelle.

Et puis accepter que parfois, ils sont ailleurs, ne se sentent pas concerné(e)s, il en restera tout de même quelque chose.

Avec tes collègues, ce doit être parfois difficile, parce que justement parfois la loi et les décisions juridiques paraissent injustes, dures, au niveau social, humain. Là aussi, tu pourrais de temps en temps parler avec eux de leur vécu professionnel antérieur, leur proposer de temps en temps un cours informel de droit concernant globalement la formation dispensée dans l’école. Et puis, il faut du temps pour s’intégrer à une équipe.

En tous les cas, tes préoccupations montrent que tu es faite pour le métier. Bonne suite !

4)
zit
, le 25.02.2013 à 10:53

Il m’arrive d’essayer de donner quelques bases de photographie à de jeunes adultes scolarisés dans une école dite supérieure, et je trouve que c’est de plus en plus difficile d’obtenir une attention soutenue plus de 45 minutes (et encore, pour certains, ça décroche bien plus vite). Pourtant, le sujet que je traite est celui qui est censé les intéresser en premier lieu, je ne les noie pas non plus sous des tonnes de courbes et autres notions trop abstraites. J’en discute avec d’autres collègues et ils ont la même sensation (ce ne doit donc pas être que de ma faute).

La discipline dont ils sont venus chercher l’enseignement est pour moi une passion, un moteur; chez eux, je ne sent pas souvent autre chose qu’un intérêt poli (quand ce n’est pas un ennui profond). Pourtant, ils ne sont pas obligés de continuer leur scolarité… En fait, ils ont la sensation d’avoir réussi le plus dur, à savoir le concours pour rentrer à l’école !

Pour certains, la moindre remarque d’ordre technique est balayée (sous le tapis) d’un Auguste « Ah, mais c’est comme ça que je l’ai voulu  » (le flou, la sous–exposition, le cadrage bancal…mon œil !) de jeune artiste tentant de s’affirmer. On peut vouloir faire des photos floues, mal cadrées, mal exposées (voire tout ensemble), mais elles n’en seront que meilleures si l’on sait d’abord les faire nettes, bien composées et correctement exposées, non ?

Le problème, c’est qu’ils ont du mal à comprendre que pour un Andreas Gurski ou un Steven Spielberg (ils sont élèves dans une section Photo/Video), des milliers d’autres doivent connaître un métier pour gagner leur vie. Une amie galeriste le dit souvent, « Artiste, ce n’est pas un gagne pain », car il faut, en plus de payer la production de ses œuvres, quand même manger, payer son loyer, s’habiller…

z (et tous ces petits soucis ne sont rien, comparés à ce qu’endurent les profs du côté de la scolarité obligatoire, je répêêêêêêêêêêête : quel gâchis !)

5)
ToTheEnd
, le 25.02.2013 à 11:24

Monter sa boîte?

6)
Modane
, le 25.02.2013 à 12:08

<mode râleur> Entre les pros et les étudiants, j’ai pu choisir. Les pros. J’aime travailler dans le dur, dans le concret, sans avoir à retrouver les fantasmes puérils dont j’ai eu tant de mal à me débarrasser moi-même.

Zit a bien raison. Ah! Cette lueur d’incrédulité quand on leur parle de métier! Et cette vacuité splendide dans le propos, lors de ces discussions sur les cinéma comparés où chacun ressort son cours de fac par coeur, alors qu’il s’agit de monter un sujet de news d’une minute trente où Truffaut, comme Hitchcock, n’a rien à faire!… Non non… Décidément, donnez moi des pros, qu’on puisse travailler! </mode>

7)
Ellipse
, le 25.02.2013 à 12:12

@ zit

Hélas, parfois j’ai la même impression… Je n’hésite pas à les “secouer” (verbalement s’entend), voir remarque ci-dessous …

@ TTE

Pas faux, nos chers têtes blondes ont les choses toutes cuites dans l’assiette, ils oublient trop souvent la chance qu’ils ont de pouvoir étudier et le travail derrière tout cela. Après, ils vont payer chèrement leurs formations continues. Bon, c’est aussi vrai qu’actuellement c’est un peu “NO FUTURE” quand les médias leur présentent les étudiants des pays du sud de l’Europe sans job ou payés au lance-pierre.

J’ai enseignée à des adultes en cours du soir, là en général, ils étudient vraiment, c’est un réel plaisir et … un défi car ils sont exigeants.

8)
Saluki
, le 25.02.2013 à 12:20

Déci-dément ;°)) le lundi est le jour des formateurs…

Pour revenir sur les publics, les z’apprenants, comme ils disent dans les bureaux, il y a les blasés ’’consommateurs’’, ceux de Zit qui croient avoir passé le plus dur, mes anciens de Mastère qui, parce qu’ils avaient (payé ou ) fait payer le prix fort pour leur année scolaire, s’octroient le droit de picorer.

Et il y a les ’’demandeurs’’, ceux que j’ai maintenant : qui viennent après le boulot, qui croient que ce que je leur fais va leur apporter un peu de meilleure vie.

En tout cas notre Amie est sur le bon chemin : se poser des questions est déjà entrevoir la réponse.

9)
Madame Poppins
, le 25.02.2013 à 16:21

Mille merci pour vos commentaires : j’y reviendrai de façon détaillée ce soir ou demain.

Mais je m’interroge : personne (autre qu’enseignant) ne ressent de frustrations professionnelles sur ce site ? Serait-ce l’apanage des “profs” ? Allons, vous ne me ferez pas croire qu’un médecin, un informaticien, un opticien, un traducteur ne vivent pas aussi des frustrations professionnelles

Parfois, d’ailleurs, en apprendre davantage sur les “soucis” que vivent les autres professions permet de relativiser un peu ses propres “angoisses” existentielles, non ?

A plus tard, je file, j’ai un support de présentation à terminer !

10)
Leo_11
, le 25.02.2013 à 17:11

Pour ma part je partage tes frustrations…

Je suis enseignant de branches techniques pour des apprentis en dual… le problème majeur rencontré c’est que, la plupart du temps, le fait d’être 4 jours par semaine en entreprise fait que ce qui se dit en cours est balayé par des employés/patrons/techniciens qui n’ont pas compris que la technologie est indispensable pour se permettre de la contourner en cas de besoin… mais de façon réfléchie…

Bref… des solutions miracles… ça n’existe pas… hélas…

11)
ysengrain
, le 25.02.2013 à 19:09

À une époque où c’était encore utile, j’avais publié – c’était nouveau – un modèle mathématique permettant de maitriser l’utilisation d’un médicament aux effets secondaires notables. Le responsable de l’enseignement à la fac de ma spécialité m’a demandé de faire un cours aux étudiants de la spécialité.

2 heures de cours. J’explique les fondamentaux. Puis je montre une formule mathématique -et une seule. J’explique l’intérêt: maitrise totale des effets secondaires, qualité maximale de l’effet principal recherché. Enfin, je relate mon expérience excellente avec une fiabilité proche de 100%.

Aucun intérêt de l’auditoire, aucune question.

L’année suivante, le responsable de l’enseignement m’a à nouveau sollicité. J’ai décliné l’offre.

Avais je été mauvais ? Sans intérêt ? Je ne sais répondre, mais frustré oui, à tout le moins incompris.

12)
François Charlet
, le 25.02.2013 à 23:54

En 2011 et 2012, j’ai été enseigner plusieurs fois le droit relatif aux technologies (notamment le droit pénal, droit d’auteur, protection des données) à la HEIG-VD à Yverdon-les-Bains et à l’ERACOM à Lausanne. Je vais te faire part de mon expérience.

Oui, le droit, c’est difficile à enseigner à des jeunes. Dans mon cas, c’était principalement des informaticiens en devenir, autrement dit (je schématise à outrance) plutôt adeptes des sciences exactes et pas forcément des sciences humaines. On a beau donner tous les exemples du monde pour illustrer une base légale, les réponses du genre “ça dépend…” ou “en principe…” ou “il y a une controverse que le Tribunal fédéral n’a pas encore tranchée…” n’aident pas. Pour l’informaticien qui a peut-être l’habitude de 0 et de 1, l’incertitude pose souvent problème. Le gris juridique fait tache dans le monde noir et blanc de l’informatique.

Ensuite vient le problème de la langue. Les termes juridiques techniques dans le monde des technologies ne correspondent pas nécessairement à ceux qu’emploient les informaticiens. Pourtant, ils désignent la même chose. C’est certainement l’une des, si ce n’est la première source de confusion.

Pour la pratique (car il est évident que le droit enseigné comme à l’université, sous une forme d’apprentissage par coeur et de masturbation intellectuelle, ne convient pas à ces jeunes), je pique des cas dans les journaux récents, si possible datant d’au maximum une semaine, ou alors parlant d’une affaire retentissante. Puis, à partir de là, j’ajoute des détails, les uns après les autres. Certains élèves voient des détails que d’autres ne voient pas, et vice versa, puis on regarde ce que ces détails (pris un par un) changent à la situation de base. A la fin, on a un cas très complexe qu’ils ont pourtant réussi à analyser. Un peu de satisfaction personnelle peut rendre service pour l’apprentissage voire augmenter l’intérêt pour le cours.

Une autre méthode consiste à ne pas faire de cas pratique, mais à faire parler les élèves d’expériences personnelles (ou non) où ils se sont demandé si leur action, celle d’un collègue ou si un ordre d’un supérieur était “licite”. Le but est d’amener les élèves à discuter entre eux, l’enseignant ne jouant qu’un rôle d’orientateur ou d’arbitre. C’est intéressant pour l’enseignant (ça permet de découvrir des situations qu’on n’aurait peut-être pas imaginées ni traitées dans des cas préparés à l’avance) et pour les élèves (qui se muent en jeune conseillers juridiques). De plus, on peut ainsi discuter et confronter nos points de vue (par exemple quand l’enseignant soutient une position juridiquement correcte mais humainement “injuste”, ou l’inverse).

Toujours est-il que pour arriver à cela, il faut nécessairement passer par une ou deux heures de théorie, souvent pénibles… Intéresser des gens n’est pas une chose facile, surtout quand le cours est imposé. J’ai déjà réussi à dynamiser mes cours en laissant (presque) tomber Powerpoint & Cie. Le reste, ça dépendra des talents de conteur de l’enseignant… Et plutôt que de faire de grandes pauses peu fréquentes, autant faire le contraire : plus de petites pauses. La concentration soutenue plus de 30 minutes, je n’y crois pas vraiment…

Quant à mes frustrations, je partage l’opinion de Modane . Enseigner à des professionnels (dans mon cas, d’autres juristes) m’apporterait plus de plaisir, bien que j’en aie à enseigner à des étudiants.

13)
jpg
, le 26.02.2013 à 00:16

@ysengrain

Lorsqu’à l’issue d’un cours, aucune question n’est posée c’est soit parce que les étudiants n’ont rien compris, soit parce qu’ils ont tout compris. La seconde option me paraît plus plus probable (et meilleure pour le moral du prof.).

14)
Lémanic
, le 26.02.2013 à 10:30

Comme chargé de cours dans une HES, je comprends la frustration de Mme Poppins et je confirme les dires et les observations de F. Charlet. Souvent en rentrant je me pose la question du bien fondé de mon travail. Une attention très limitée des étudiants – vive le wifi, les laptops, tablettes et autre smartphones qui font une concurrence impitoyable à l’enseignant – et un intérêt qu’il faut savoir débusquer… Dans les classes de première année, j’ai eu l’impression qu’un bon tiers des étudiants est là par défaut, dans les classes de troisième (là où ma matière est en marge du cursus), l’objectif est de finir tant bien que mal pour enfin avoir ce bachelor, donc les matières annexes sont largement snobées.

J’ai l’impression – en ayant passé par la même filière il y a longtemps – que le fait d’avoir diminué les exigences d’entrée (notamment au niveau des années de pratique) dans les HES n’est pas une bonne chose. Il y a un manque de maturité et d’expérience professionnelle dommageable à une telle formation qui se veut basée sur la pratique. L’interaction qui devrait exister est aux abonnés absents.

Heureusement qu’il y a quelques fois – mais souvent après les cours – des questions ou remarques qui ouvrent un dialogue avec l’un ou l’autre étudiant. Pourquoi après les cours ? Je pense qu’il y a une crainte de prendre la parole, de s’ouvrir devant ses camarades, de passer pour celui ou celle qui n’a pas compris, qui a un doute. Dommage.

Une chose qui m’a particulièrement frappée est l’absence de projet pour une très grande partie des étudiants. Nombre d’entre eux – même en dernière année – n’ont pas d’autre objectif que leur bachelor et ne savent pas réellement ce qu’ils veulent faire. Cela ne favorise pas la motivation et l’entrain aux études. Parlant de la différence entre stratégie et objectifs, j’ai – pour provoquer – relevé que si leur objectif est d’obtenir un bachelor, leur stratégie (dangereuse) pour y arriver est d’en faire juste assez pour avoir la moyenne. Personne n’a contesté….