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Des visages qui sortent de l’oubli

 

Ceux d’entre vous qui vivent à Lausanne, et qui lisent le quotidien 24 Heures, auront peut-être vu ma chronique de samedi (avant-hier). Elle porte le même titre que cette humeur. 

Une fois que j’ai fini de l’écrire, j’étais vraiment frustrée — je n’avais que 3’200 signes à ma disposition, et pas de place pour des illustrations. Or, ce dont je parlais mériterait vraiment d’être illustré. Je profite de cette occasion pour écrire ce que, à mon avis, le sujet aurait mérité — et surtout, j’en profite pour montrer quelques photos assez uniques que j’ai réussi à… photographier, un peu à la sauvette, je l’avoue, alors concentrez vous surtout sur les contenus, je n'ai pas eu le temps de me préoccuper de qualité.

Presque un roman policier...

Lorsqu’on parle de trésors perdus dans de vieilles maisons, on voit surtout, avec les yeux de l’esprit, des espaces poussiéreux sous les combles, où les toiles d’araignée rappellent par leur fragilité même que le passé n’est qu’une faible broderie qu’un souffle de vent peut faire disparaître. 

On ne pense pas aux caves de la police d’un Etat démocratique.

Et pourtant… 

Pourtant, à l’automne 2006, le service photographique de la police cantonale de Zurich a mis la main, dans ses sous-sols, sur un trésor totalement inattendu et atypique: de vieux rouleaux de négatifs auxquels étaient attachés des numéros et une liste de localités zurichoises: Adliswil, Adelfingen, Gattikon, etc. jusqu’à Waldegg et Wengisbad. En tout 4’365 photos.

Qui donc sont ces gens?

Des réfugiés de la Deuxième Guerre mondiale, juifs et non-juifs, opposants politiques, femmes et enfants menacés, souvent arrivés en Suisse par les chemins de traverse. Les noms de la plupart d’entre eux sont perdus. 

Et les localités sont celles où il y avait «leurs» camps.

Voici, par exemple, une photo d’époque qui montre un de ces camps: celui de Hinwil, je crois (je ne suis pas sûre de la localité).

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Les camps étaient généralement placés dans des usines désaffectées

 

Il se trouve que dans une des communes concernées, Adliswil, vit un historien, Christian Sieber. Son domaine, ce serait histoire médiévale. Mais le passé de sa petite ville l’a interpellé. Depuis plusieurs années, il tente de reconstituer la vie du camp d’Adliswil, un des les plus importants de Suisse. Documents, témoignages de survivants, il cherche.

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L'historien Christian Sieber devant l'usine désaffectée où était le camp d'Adliswil (Photo Heinz-Heiri Stapfer)

 

«C’est incroyable que ces camps aient pareillement pu tomber dans l’oubli», s’étonne-t-il. 

Les autorités ont toujours veillé à ce que les réfugiés aient aussi peu de contact que possible avec la population, et ainsi, les mentions des camps ont toujours été rares. Mais même lorsqu’enfin la discussion historique sur la Suisse et la guerre a commencé, on a continué à ignorer ce type de camps. 

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A leur arrivée, les réfugiés étaient enregistrés par la Police cantonale, photographiés…

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…puis on prenait leurs empreintes digitales - même celles des enfants, avant de les placer dans un des camps disséminés à travers le canton - à travers le pays, en fait.

Les archives fédérales sont inaccessibles pendant 50 ans, celles du canton de Zurich pendant 80 ans. Il a donc longtemps été impossible de puiser dans les documents d’époque.

En se promenant à Adliswil, cela touche de penser que tant de gens, parfois tout juste échappés de massacres, parfois évadés de camps de concentration, ont attendu dans une de ces fabriques désaffectées qu’on dispose d’eux. Les perspectives, à l’époque, étaient minces.

Mais ce qui émeut le plus, ce sont les photos que le hasard a sauvées de l’oubli. La plupart sont des portraits, qu’on pourrait prendre pour des photos d’identité normales, n’était-ce que chaque personne porte sur elle un numéro, car chaque réfugié avait le sien. On est frappé par les regards. 

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Chez certains, les yeux sont morts, ils fixent le vide — ces hommes et ces femmes-là n’attendent plus rien.  

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Mais chez d’autres, ils sont pleins d’espoir, ils voient l’avenir en dépit de l’horreur dont ils sortent, et qui les entoure encore, tout juste au-delà de la frontière.

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Et puis il y a les enfants. Un peu perdus, un peu sérieux, un peu insouciants; ils sont la génération qui reconstruira l’Europe, les premiers acteurs de la révolution technologique à venir; dans ce contexte, on ne peut s’empêcher de penser que la plupart d’entre eux ont failli ne jamais avoir d’avenir — ils n’ont échappé à la mort que grâce au courage des adultes qui les ont sortis de l’enfer. 

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Ces enfants ont pu être arrachés au camp de concentration de Theresienstadt…

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…tout comme les adultes qui les ont accompagnés (Photos Geschichteverein Adliswil)

On se rend compte en lisant les documents qui font lentement surface que pas mal de ces enfants avaient été mis en sécurité par des parents disparus dans la tourmente.

Derrière chacune de ces photos, il y a un drame, on peut en être certain.

Voici, à titre d'exemple, deux histoires qui ont survécu — il y en aurait d’autres.

 

Ella l’héroïne sentimentale

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Ella Wolfinger (au centre) à Adliswil, avec les soeurs Reichle. Cette photo ne vient pas des archives de la police, elle appartient à Emma Reichle (à gauche sur l'image).

Si nous connaissons l’histoire d’Ella, c’est à la fois parce qu’une jeune fille de l’époque, Emma Reichle, vivait encore en 2008 et se souvenait parfaitement d’elle, et parce que le Mémorial de l’Holocauste de Washington a gardé sa trace. Ella était juive autrichienne, elle avait dû fuir son pays en automne 1938, mais ses les parents avaient été forcés de rester, et étaient en grave danger d’être déportés.

A Adliswil, Ella était logée chez une couturière, Mme Reichle. Si on avait cherché pour elle une maison privée, c’est qu’en arrivant en Suisse, elle avait dû être opérée de l’appendicite, et qu’elle avait besoin de convalescence. Elle a partagé la chambre d’Emma, la fille de la couturière, pendant quelque deux mois, puis elle est partie pour la Bolivie: elle avait un visa d’entrée dans le pays. Ce que les gens qui l’ont accueillie ne savaient pas, c’est qu’elle n’avait pas choisi de partir, elle cédait à un chantage sentimental: un homme qui avait émigré en Bolivie, qui était amoureux d’elle et qu’elle n’aimait pas, lui avait promis, si elle l’ épousait, de procurer un visa pour la Bolivie aussi pour ses parents. Ella s’est sentie tenue de s’exécuter. Pendant la traversée, elle est tombée amoureuse folle d’un marin, mais à son arrivée, par dévouement envers ses parents, elle a tout de même épousé l’homme qui avait fait le chantage. Le mariage ne pouvait qu’être malheureux, dans de telles conditions; en 1943, Ella s’est suicidée.

 

Manès Sperber, l’écrivain

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Manès Sperber à Zurich, en 1942 (photo ORF)

Parmi tous les réfugiés de ces camps, il y a eu au moins une plume. Ce n'était pas encore un écrivain, mais les vicissitudes de la guerre lui ont donné une voix, et il a parlé de ses expériences dans ses livres: Manès Sperber.

Il était né en 1908 en Galicie, mais avait passé sa jeunesse d’abord à Vienne, puis, quand le danger était devenu imminent, à Paris. Il avait obtenu la nationalité française. Lorsque les Allemands avaient occupé le Nord de la France, il avait passé au sud, puis quand les Allemands étaient arrivés au Sud, il avait craint la déportation pour lui, sa compagne et l’enfant qu’ils venaient d’avoir: il était un militant de gauche connu, et il était juif, le danger était donc double. Ils sont arrivés en Suisse.

Je lui laisse la parole, c’est tiré de son livre «All das Vergangene», publié en français sous le titre «Ces temps-là». C’est vu de l’intérieur, par un oeil particulièrement attentif:

«J’ai eu l’autorisation de voir [ma partenaire et future femme Jenka et mon fils Dan] dans un home de l’Armée du Salut [à Lausanne], je suis resté deux jours. Dès mon retour, j’ai, comme tous les réfugiés qui étaient à Zurich, été remis aux autorités militaires, qui nous ont internés dans ce qu’ils appelaient des camps de regroupement; ils nous surveillaient étroitement, comme si nous avions risqué de nous évader pour retourner en France.

Dans ces camps, où les internés n’avaient absolument aucun droit, la moindre velléité de plainte était strictement interdite, se plaindre était pour ainsi dire un acte de mutinerie. Ceux qui avaient voulu et organisé ce camp travaillaient dans l’esprit d’Adolf Hitler. Les camps de travail civils dans lesquels les réfugiés ont été transférés au bout d’un an environ étaient plus agréables: les internés y jouissaient de certains droits et de certaines libertés; ils n’ont plus été traités comme des parias ou comme de dangereux criminels. Dès avant la fin de la guerre, l’opinion publique suisse a commencé à se confronter aux responsabilités de la politique envers les réfugiés, et à montrer du doigt ceux qui l’avaient mise en pratique pendant les années les plus dures. 

Une fabrique textile désaffectée faisait fonction de camp pour quelques centaines de réfugiés, il n’y avait que des hommes, les femmes et les enfants étaient placés ailleurs, pour des raisons inexpliquées dont la pertinence échappait. Nous dormions sur de la paille, que nous devions parfois sortir dans la cour, qu’il neige ou qu’il vente, pour l’aérer; une fois qu’elle était suffisamment humide et sale, nous la ramenions dans les dortoirs, où nous étions serrés les uns contre les autres. Tout était à l’avenant: la nourriture, les points d’eau pour l’hygiène, les latrines dans la cour. Mais le pire, c’était le ton méprisant des soldats, des sous-officiers et de la plupart des officiers; on avait sans doute ordonné à la troupe de nous traiter comme des lépreux.»

Sperber avait fini par tomber malade, et grâce à l’intervention d’un de ses amis qui était comédien au Schauspielhaus de Zurich, il avait pu être placé chez un pasteur, et il avait retrouvé sa femme et son fils. Comme il n’avait pas le droit d’avoir d’activité, il passait ses journées à la bibliothèque, à lire et à écrire — et c’est ainsi qu’il est devenu écrivain. Depuis, il a atteint la célébrité, et a écrit un grand nombre de livres, parmi lesquels la trilogie «Une larme dans l’océan», un chef-d’oeuvre sur la politique, la guerre, l’espoir des hommes, qui li a valu de nombreuses distinctions et qui a été traduit en de nombreuses langues. Il a toujours refusé de retourner en Allemagne et en Autriche; après la guerre, il s'est installé à Paris, où il est mort en 1984.

Les gardiens de la mémoire

Depuis la découverte du trésor photographique dans les caves de la police cantonale zurichoise, deux personnes se sont attelées au travail de mémoire. Une archiviste des Archives cantonales (où ont été transportés les négatifs et les documents qui les accompagnent), Monika Bach; et Christian Sieber, l’historien d’Adliswil, qui a décidé de retracer les circonstances, l’histoire, les tenants et les aboutissements de ce qui fut le camp d’Adliswil, situé dans une vieille fabrique qui existe encore et dont les halles sont devenues actuellement de locaux commerciaux. L’un et l’autre tentent d’éclairer ce coin négligé de l’histoire suisse dans le contexte de la Deuxième Guerre mondiale.

Christian Sieber se propose de publier prochainement un livre sur le sujet — il sera bien sûr en allemand, mais en attendant je vous renvoie au site de la Société d’histoire d’Adliswil, ou, toujours si vous lisez l'allemand, au Zürcher Taschenbuch 2008, où l'on trouve une première description du trésor photographique retrouvé.

Toutes les photos, sauf celles dont je donne de cas en cas une autre provenance, sortent des Archives du canton de Zurich.

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Un instant de détente dans une époque sombre: un papa vient sans doute voir sa femme et ses enfants, qui ne sont pas dans le même camp que lui. On ne connaît pas leurs noms.

12 commentaires
1)
Alexandre
, le 11.01.2010 à 00:31

merci anne pour cet article très émouvant… habitant zurich, je traverse adliswil régulièrement, sans vraiment m’y arrêter. je prendrais soins de m’y arrêter la prochaine fois…

…et quelle magnifique photo celle de cette dame dormant sur la paille.

alexandre

2)
François Cuneo
, le 11.01.2010 à 08:37

Merci pour ce retour sur le passé.

Juste pour dire: quel n’a pas été mon étonnement de voir sur mon livret militaire, à 20 ans, que j’étais originaire de Lausanne, et d’Adliswil.

Faudra que j’y passe un jour, et j’irai voir les bâtiments.

3)
ysengrain
, le 11.01.2010 à 08:54

Il ne faut JAMAIS oublier que “ça” a existé et que le comportement actuel de certains gouvernements d’Europe de l’Ouest n’est pas fondamentalement différent.

“Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu” Brecht

4)
alec6
, le 11.01.2010 à 09:08

Merci Anne

Comme le dit Ysengrain, il n’est pas nécessaire d’aller bien loin aujourd’hui… Quai de Jemmapes et de Valmy sur le canal de l’Ourcq dans le 19e à Paris, des migrants afghans sans abris sont rassemblés y mangeant, et y dormant dans le froid que l’on connait en ce moment… dans l’indifférence la plus totale des pouvoirs publics !

Il ne s’agit même plus d’indifférence, mais de mépris… voire de haine.

5)
ysengrain
, le 11.01.2010 à 09:13

Pour faire suite et compléter le propos d’Alec6: ici

6)
Guillôme
, le 11.01.2010 à 10:33

Merci Anne pour nous faire partager cette chronique en version complète

7)
Caplan
, le 11.01.2010 à 11:30

Merci Anne pour avoir développé cette page d’histoire. Mais:

Chez certains, les yeux sont morts, ils fixent le vide — ces hommes et ces femmes-là n’attendent plus rien.

Je trouve que tu y vas un peu fort dans l’interprétation des photos. On pourrait prendre la photo d’identité de beaucoup d’entre nous (de moi, en tout cas…) et en tirer le même commentaire…

Ces deux personnes sont arrivées en Suisse et elles ont plus à attendre que celles qui sont restées dans un camp de concentration nazi.

Je crois que toutes les réactions de la Suisse étaient dominées par la peur. Tous les gens qui venaient de l’extérieur, persécutés et persécuteurs étaient considérés comme des belligérants et on n’aime fondamentalement pas les gens qui se battent. Avec le recul, cette peur est en grande partie irrationnelle, mais on ne peut pas savoir quelle aurait été notre réaction dans l’incertitude totale de ces jours très très sombres.

Milsabor!

8)
Modane
, le 11.01.2010 à 11:41

Très émouvant, ce rappel… Gardons les yeux (et l’esprit) ouverts! Merci Anne!

9)
Anne Cuneo
, le 11.01.2010 à 11:56

J’ai reçu ce matin – et je reçois régulièrement – des messages mail me disant qu’on me posait des questions en privé «pour éviter la polémique». Allez, les lecteurs et les lectrices, posez des questions qui pourraient être polémiques (ce qui n’est d’ailleurs pas toujours le cas): c’est ça qui anime les débats! La question de savoir si, par rapport à ces camps, la Suisse n’aurait pas pu faire mieux n’est pas polémique: je me la suis posée aussi, en écrivant; en lisant le récit de Manès Sperber, notamment. La réponse partielle est que la population vivait aussi un présent précaire: jusque très tard, il y a eu l’incertitude d’une invasion.

Je voudrais redire quelque chose que j’ai déjà eu l’occasion d’exprimer ici: il ne faut pas confondre l’attitude de la grande industrie, de la banque, et d’une partie (heureusement minoritaire) du gouvernement qui était ouvertement pro-nazie, avec la population, qui était en majorité écrasante violemment anti-nazie, et qui vivait dans des conditions précaires: rationnement, difficultés à obtenir suffisamment de nourriture pour tout le monde. Bien sûr, les autochtones, qui étaient chez eux, avaient une vie plus agréable que des gens perdus, affamés, transis de peurs diverses, qui arrivaient clandestinement. Mais pour la vie quotidienne, les difficultés de la Suisse ont été réelle.

Ce qui est impardonnable dans les camps dont je parle ici, c’est de traiter les gens, «comme des parias», avec mépris. Mais la Suisse a eu à accueillir vraiment beaucoup de monde. En cours de route (trop tard pour beaucoup de juifs, notamment), elle a corrigé sa politique d’asile, et a cessé de repousser ceux qui passaient la frontière (en 1942 ou 1943, je crois): cela a donné des camps d’autant plus surchargés, des problèmes accrus d’intendance etc.

10)
fxc
, le 11.01.2010 à 12:54

J’ai reçu ce matin – et je reçois régulièrement – des messages mail me disant qu’on me posait des questions en privé «pour éviter la polémique».

C’est au pied du mur que l’on voit le maçon et je pose donc ici le mail envoyé à Madame Cuneo…

Bonjour Anne,

je n’aime pas la polémique et c’est pour cette raison que je me permet de vous écrire en privé.

Votre humeur de ce jour m’interpelle fortement et qlqs questions me viennent à l’esprit.

1° Dans votre pays inventeur de la croix-rouge pourquoi ces internements avec si peu de “confort” à la limite pas très éloigné de celui des militaires prisonniers en allemagne, je sais que la vie en Suisse était tout aussi difficile que dans les autres pays européens envahis.

2° la question polémique maintenant….. une recherche d’archives ne pourrait-elle pas amener à la conclusion d’un arrangement possible entre l’allemagne et la suisse envers ces expatriés, vous remarquerez que je met cela au conditionnel le plus pur.

Je suis un inconditionnel de votre pays, j’ai dû y aller plus d’une centaine de fois dans ma vie et il y a une dizaine d’année en revisitant Adelboden je suis tombé par hasard sur une plaque de cuivre d’un militaire anglais qui remerciait ce village de la qualité de son acceuil durant la guerre et cela m’avait surpris à l’époque, j’ai passé une partie de cette matinée à faire une recherche sur google et j’ai trouvé

ceci

qui explique qu’ils étaient apparemment mieux soignés que les réfugiés.

Voilà une partie des réflexions qui m’habite ce matin .

P.S. Vous m’avez en partie répondu sur le commentaire précédent le mien

11)
Anne Cuneo
, le 11.01.2010 à 13:20

2° la question polémique maintenant….. une recherche d’archives ne pourrait-elle pas amener à la conclusion d’un arrangement possible entre l’allemagne et la suisse envers ces expatriés, vous remarquerez que je met cela au conditionnel le plus pur.

On peut toujours trouver «des preuves» pour de telles suppositions de complot. A franchement parler, je ne crois pas: ceux qui ont décidé d’expulser les juifs qui arrivaient, ou de les empêcher d’entrer étaient d’accord avec l’Allemagne, probablement, quant au jugement sur les juifs – le racisme antijuif dépasse de loin l’Allemagne nazie. Mais à un moment donné (1943, je dirais après voir consulté le site que tu indiques), la pression a fait que on a cessé de repousser les réfugiés. Je pense que tout au long de la guerre, les nazis auraient préféré exterminer certains plutôt que de les voir sauvés par la Suisse.

Je ne connaissais pas le site d’histoire, notamment Suisse Atrium. Lecture intéressante, je garde la référence!

12)
zit
, le 14.01.2010 à 12:17

Merci, Anne, pour ce récit. On retrouve bien là ta manière profondément « humaniste » de nous raconter une histoire.

La triste aventure d’Ella m’a fait penser au (début du) film Naked Tango, une improbable coproduction Suisse/Argentine/Japon/Etats-Unis avec Vincent D’Onofrio, Mathilda May et Fernando Rey, quelqu’un ici l’a–t–il vu ? il n’est malheureusement jamais sorti en France et c’est bien dommage…

Et cet article me rappelle une lecture récente : « 186 marches vers les nuages » de Joseph Bialot, roman passionnant et très dur dans lequel un allemand raconte ses 11 années d’internement en camps, de 1934 à 1945, sur fond d’enquête policière. On peut lire ici un long entretient de Bialot, en 2002, à l’occasion de la sortie de « C’est en hiver que les jours rallongent » dans lequel il raconte son séjour à Birkenau et Auschwitz. J’apprécie beaucoup cet auteur plus connu pour ses polars « saignants » (c’est lui qui le dit), et on retrouve dans ses histoires quelque chose qui me fait penser à la « manière » d’Anne. Je pense en particulier au « Semeur d’étincelles », roman qui nous décrit des destins tragiques au cours de la première moitié du vingtième siècle. On y retrouve, comme dans les romans d’Anne, des personnages que l’on a du mal à quitter une fois le livre fini.

z (à lire en écoutant de la musique kletzmer, je répêêêêêêêêête : à la fois triste et joyeuse, comme la Bossa, comme la vie)