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La nature de l’Homme
Il y a quelques jours, alors que je tentais de garder mon calme face à un Junior (six ans) écumant de rage (pensez donc, je venais de lui refuser le droit de regarder la télévision avant 18h00), j'ai essayé, pour ne pas succomber à la tentation de hurler moi aussi, de me souvenir que le propre de l'être humain, peu importe son âge, est de repousser, encore et toujours, les limites.

Petit Enfant et Enfant aimeraient pouvoir faire disparaître celles imposées par leurs parents, qui, eux, s'accrochent à une phrase célèbre (dont l'auteur m'échappe maintenant) "c'est parce que je t'aime que je te pose des limites". Pendant ce temps, Ado fume des joints avec ses copains, convaincu d'être cool et d'avoir dépassé les principes "petit bourgeois" de ses "vieux".

Bref, rien de très original mais je pense que c'est notamment dans la prime enfance que prend racine, chez certains êtres humains, ce besoin d'aller toujours plus haut, toujours plus loin, toujours plus vite.

Le fait que certaines limites soient dépassées me laisse totalement indifférente : même si un jour, un athlète devait remporter quinze fois le Tour de France, je ne trouverais toujours pas ça intéressant - et continuerais certainement de m'interroger sur le nom de son "chimiste" -. Ce qui ne signifie pas que les sportifs ne puissent pas me toucher : il y a des caractères et des parcours qui forcent le respect.

Il n'y a pas que le sport qui permette à l'homme d'exprimer sa rage de vaincre et de repousser les limites : ainsi, certains consacrent une grande partie de leur vie à lutter contre une maladie, à ce jour malheureusement sans succès, tandis que d'autres découvertes majeures sont le fruit du hasard ou résultent de l'usage, dans la vie civile, d'un moyen initialement militaire.

Très nombreuses sont les inventions qui constituent un réel progrès, du moins à mon avis; en revanche, dans certains cas et dans d'autres domaines, franchement, je ne sais pas et m'interroge.

Un exemple ?

Les progrès médicaux qui permettent maintenant de faire face à la très grande prématurité. En d'autres termes et exprimée de façon crue, ma question est la suivante : le fait de sauver de la mort un enfant né à 22 semaines (au lieu de 40) constitue-t-il réellement un progrès, sachant que selon une grande vraisemblance, cet enfant - et sa famille - devront faire face à de lourds handicaps ?

Admettons que non : la nature seule ne permet pas qu'un enfant né avec autant d'avance sur son développement intra-utérin survive. N'empêche, force est d'admettre que les enfants nés aux alentours de 30 semaines se développent aujourd'hui souvent très bien, ceci bien que nés deux mois et demi trop tôt.

Vous me voyez venir, j'en suis sûre : où est la limite entre "progrès" qui permet à une famille de serrer par la suite son enfant dans ses bras et où commence la "folie médicale", quand le médecin est-il un génie qui redonne de l'espoir à un couple et quand est-il un acharné qui n'est pas capable d'admettre que la nature a posé des limites qu'il ne doit pas dépasser ? Je ne peux qu'interroger, bien malin qui aura la réponse.

Il y a quelques mois, le débat autour de ces femmes devenues mères à un âge où leurs copines deviennent grands-mères avait fait rage : partout, l'on pouvait lire peu ou prou le même commentaire "pourquoi ces femmes ne sont-elles pas capables d'admettre que la ménopause est une limite de la nature et que cette limite, il convient de la respecter ?"

Alors oui, c'est vrai, la nature veut que la femme soit en mesure d'enfanter jusqu'à (environ) 45 ans, tandis que l'homme, lui, peut devenir père jusqu'à sa mort (ce qui aurait pu passer pour une affirmation caricaturale est - presque - devenu une réalité depuis l'invention du viagra). Mais puisque personne ne s'étrangle lorsqu'on met en oeuvre beaucoup de moyens pour sauver un prématuré, pourquoi ne serait-il pas légitime de mettre en oeuvre des moyens pour repousser les conséquences de la ménopause ?

Qu'on me fasse grâce des arguments "oui mais les enfants, faut pas juste les avoir, il faut ensuite aussi être en mesure de s'en occuper et ça, on ne peut pas quand on a 60 ans à la naissance de son bébé". Il est évident que la probabilité que Maman assiste à la remise de bac de son enfant n'est pas immense, celle qu'elle soit sur les marches de l'église le jour du mariage très faible, celle qu'elle connaisse son petit-fils presque nulle.

N'empêche, cet enfant aura eu une mère durant, qui sait, dix, douze, quinze ans, peut-être même plus et je pense qu'il aura pu développer avec elle une réelle relation, quand bien même cette mère n'aura jamais été capable de faire du foot. Un enfant devant passer le plus clair de son temps en institution, ses parents n'étant pas en mesure d'assumer sa prise en charge en raison des nombreux handicaps occasionnés par sa naissance très prématurée, aura aussi une maman, probablement beaucoup plus longtemps mais comment va-t-elle vivre, cette femme ? Divorcée certainement - si j'en crois les statistiques rapportées par une amie travaillant dans une de ces institutions -, se sentant coupable selon une certaine vraisemblance, s'interrogeant peut-être parfois sur la question de savoir si la médecine a été, pour son enfant et pour elle, un réel progrès.

Loin de moi l'idée de cautionner ces naissances très tardives, tout comme m'est totalement et parfaitement étrangère l'idée de critiquer les parents qui ne peuvent pas s'occuper d'un enfant gravement handicapé et qui doivent se résoudre à le confier à des professionnels une grande partie de l'année. Mes propos, provocateurs, ne sont que le reflet de la seule conclusion à laquelle je parviens aujourd'hui : parfois, l'Homme devrait mettre moins d'énergie à vouloir dépasser certaines limites et mettre davantage l'accent sur l'éthique de ses recherches.

Qu'en pensez-vous ?

50 commentaires
1)
Leo_11
, le 09.03.2009 à 06:05

Dans la même veine… ces personnes qui sont dans un coma profond quelques années (dizaines ?) et qu’il n’est pas possible de laisser “partir” car un prétendu religieux bien pensant et/ou gouvernement s’y oppose à cause d’une certaine morale…

Je suis farouchement opposé à toutes sortes d’acharnement thérapeutiques… et je sais de quoi je parle, s’y ait été confronté… lorsque ma mère est décédée à cause de ce p**n de crabe… les médecins se sont acharnés sur elle pour tester de l’un ce nouveau traitement, de l’autre cette merveilleuse machine… sans rien communiquer… Et cette image de ma mère qui ne me quittera jamais dont les yeux me suppliaient de faire quelque chose pour qu’elle n’aie plus jamais mal…

Puis un jour, sans crier gare, ils ont décidé de laisser tomber… ils se sont désintéressés de leur “jouet” comme le bambin qui en a marre de sont camion…

L’acharnement quel qu’il soit est mauvais… il fait bien plus de mal que de bien aux personnes qui y sont confrontées…

2)
Yip
, le 09.03.2009 à 07:48

Bien d’accord avec vous deux, toute la difficulté c’est de fixer la limite à ne pas dépasser et de ne pas oublier une information claire des familles, encore plus importante que d’habitude, pour des traitements “standards”.

3)
Philob
, le 09.03.2009 à 07:53

C’est une question qui, encore aujourd’hui, n’a pas trouvé de réponse chez moi et, de plus, continue de me mettre mal à l’aise.

J’étais assez pour les accouchements à domicile, vous savez avec le père qui coupe le cordon. Ben ma fille aînée qui vient de terminer ses études de droit (et oui Mme Poppins et qui cherche du travail) s’il elle n’était pas née au 20 siècle, elle n’aurait pas survécu à l’accouchement et d’ailleurs sa mère non plus (accouchement normal avec “élargissement” au bistouri de la sortie, ensuite forceps et pour terminer une césarienne avec le dernier coup de bistouri à 1 cm de l’oeil de ma fille qui avait sa tête collée à la paroi), genre d’accouchement que l’on n’oublie pas.

Ma fille est radieuse et bien vivante, alors depuis ce jour, je suis beaucoup moins sensible aux “médecines alternatives. Mais je suis contre l’acharnement thérapeutique et aussi un certain manque d’éthique dans les “progrès” de la grande prématurité (je travaille avec des polyhandicapés). Mais c’est l’éternelle question des limites, je pense qu’il faut accepter que ces limites fluctuent et si parfois elles deviennent extrêmes, il y a souvent ensuite un consensus qui s’établit.

D’ailleurs, il en est de même pour les “limites” que cherche à dépasser les ados, elles fluctuent et donc sont “incompréhensibles” pour les parents. Comme souvent, lorsque l’on est tout proche d’une “frontière” elle nous parait complètement absurde (quand vous avez 17 ans 3/4 vous ne voyez pas vraiment la différence avec votre copain qui lui en a juste 18 et pourtant…)

En médecine comme en finance, il manque beaucoup d’éthique, mais une éthique décisionnelle, pas seulement une éthique consultable. Cela ne résoudra jamais les problèmes des “frontières” mais une commission d’éthique qui pourra dire : oui ou non en se basant sur des arguments acceptés par une majorité sera un grand progrès dans nos sociétés. Mais je n’oublie pas que ces commissions d’éthique seront composées d’être humains et donc toutes les dérives seront quand même possibles.

J’aime croire que l’homme est bon et intelligent, je reste un optimiste indécrottable.

4)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 08:25

tandis que l’homme, lui, peut devenir père jusqu’à sa mort (ce qui aurait pu passer pour une affirmation caricaturale est – presque – devenu une réalité depuis l’invention du viagra)

Juste une précision: il ne suffit pas d’avoir une possibilité d’érection et d’éjaculation pour engendrer: il faut aussi que le sperme ait les qualités voulues.

Vous me voyez venir, j’en suis sûre : où est la limite entre “progrès” qui permet à une famille de serrer par la suite son enfant dans ses bras et où commence la “folie médicale”, quand le médecin est-il un génie qui redonne de l’espoir à un couple et quand est-il un acharné qui n’est pas capable d’admettre que la nature a posé des limites qu’il ne doit pas dépasser ? Je ne peux qu’interroger, bien malin qui aura la réponse.

Je n’ai pas LA réponse, mais une réponse. En matière médicale, comme dans d’autres, il est des situations où le “in vitro”, je veux dire quand on n’est pas en situation réelle, ne permet pas d’affiner l’expérience qui servira à d’autres plus tard. J’ai fait partie des équipes pionnières qui, en France, ont acquis le savoir permettant de gérer l’insuffisance rénale dite terminale. SI nous n’avions pas essayé, de façon acharnée, de pallier à nos manques en certaines circonstances, tous les insuffisants rénaux mourraient. À la même époque, le service voisin d’hématologie voyaient mourir inexorablement tous les patients atteints de maladie de Hodgkin. Il a fallu toute l’énergie et non l’acharnement des équipes de réanimation pour permettre aux grands prématurés de survivre. Cette énergie, non acharnée à tenter l’impossible, est sous-tendue par des règles non écrites, – à ma connaissance, aucun pays n’a édicté de textes précis – de bon sens et des comportements collégiaux tendant à cesser les soins quand il n’apparaît plus raisonnable à l’équipe de continuer. Je peux fournir nombre d’exemples. C’est là, dans cette attitude là, qu’on entre dans le domaine de l’éthique.

pourquoi ces femmes ne sont-elles pas capables d’admettre que la ménopause est une limite de la nature et que cette limite, il convient de la respecter ?

Je ne crois pas que les femmes dont il est question ne sont pas capables d’admettre … Mais les salopards, comme Antinori ne sachant pas comment se défaire de la cocotte minute qu’ils possèdent à la place du cerveau réussissent à persuader de pauvres femmes dans la désespérance qu’ils vont combler leur plus cher (très cher) désir d’enfanter. Voilà un acharné, un vrai, dont je me sépare totalement, définitivement et complètement.

tout comme m’est totalement et parfaitement étrangère l’idée de critiquer les parents qui ne peuvent pas s’occuper d’un enfant gravement handicapé et qui doivent se résoudre à le confier à des professionnels une grande partie de l’année.

On ne peut, en effet pas juger, mais constater les ravages. En matière médicale, on se base sur des résultats statistiques, puis on vérifie que le sujet entre dans les limites proposées. Un couple d’amis a eu 3 enfants, le dernier, un garçon est autiste, autiste “grave”. Après avoir été au plus proche de lui, après l’avoir soutenu tant et plus, vers l’âge de 13 ans, nos amis ont décidé de faire prendre en charge leur fils par un institution. Dans les mois qui ont suivi,le mari a fait un accident vasculaire cérébral et un infarctus du myocarde, tandis que la mère a déclaré une leucémie.

5)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 08:29

Cela ne résoudra jamais les problèmes des “frontières” mais une commission d’éthique qui pourra dire : oui ou non en se basant sur des arguments acceptés par une majorité sera un grand progrès dans nos sociétés.

Une question: une commission d’éthique qui proposera ces fameuses limites, ou quel que soit le nom qu’on lui donne, à ton avis, pour quelle raison pratiquement aucun pays développé ne l’a mise en place ?

6)
Philob
, le 09.03.2009 à 09:04

Une question: une commission d’éthique qui proposera ces fameuses limites, ou quel que soit le nom qu’on lui donne, à ton avis, pour quelle raison pratiquement aucun pays développé ne l’a mise en place ?

A mon humble avis, les sociétés ne sont pas encore assez “adultes”; ça serait donner un pouvoir qui ne sera ni politique, ni religieux et surtout pas économique à des “personnes”, quelles personnes ? comment les choisir ?

Je n’ai aucune des réponses, mais je ne vois pas d’autres solutions, car seul un changement assez radical pourra maintenant faire évoluer les choses. J’ai l’impression que tout ce qui a été tenté dans nos sociétés ne fonctionne qu’en partie à satisfaction.

Quand un des 3 pouvoirs (religieux, politique ou économique) est omnipotent, c’est toujours catastrophique à long terme; alors partager le pouvoir c’est une bonne solution mais il faut 2 arbitres : “le peuple” et justement ces commissions d’éthique qu’il faut inventer.

Je crois que nous sommes arrivés au point où il faut trouver de nouvelles solutions inédites et non pas un nouveau “cocktail” de mélange des pouvoirs. Nous entrons avec fracas peut-être dans un nouvel ère (ou air ou aire, ça serait pas plus mal), ça ne pourra être qu’à la fois passionnant et terrible, mais c’est en marche déjà; combien de centaines d’années faudra-t-il ?

7)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 09:43

@ Philob

Ce n’est pas une question de maturité sociale. C’est le fait qu’on ne peut au sein d’une commission, comité ou autre institution prendre en compte l’immédiateté nécessaire de la situation. Elle est faite de plusieurs éléments: -1 le patient: est il conscient, est il capable par ses dires, prises de position ou tout élément, de dire avec objectivité ses désirs. Qui parmi nous peut dire, sereinement, face à la fin de vie, avec sérénité et objectivité, je ne veux plus.

-2 l’équipe soignante. Oui, nous sommes des professionnels, oui nous avons déjà vécu des situations identiques, oui, il est facile de “débrancher”. Pour l’avoir fait plusieurs, oh oui, plusieurs fois, je sais dire que ce n’est JAMAIS sereinement. C’est très difficile, comme il n’est pas anodin d’être confronter à la mort de l’autre qui te renvoie ta propre image et ta propre fin, et bien sûr celle de tes proches. Quant à déléguer une décision de cette sorte à un membre du personnel, jamais

-3 une décision de cette sorte est de nos jours, enfin j’ose l’espérer, toujours collégiale. Le derneir cas, pour ce qui me concerne, date de la semaine dernière où une dame de 81 ans, démente, hémodialysée, porteuse d’un drain chirurgical intestinal a fait une hémorragie digestive importante. LA question qui se posait était double: doit on la transfuser ? doit on continuer à la dialyser ? sachant qu’il n’était pas question de l’opérer. Une réunion regroupant un réanimateur, un urgentiste, 2 néphrologues, dont moi-même a proposé à la famille de ne rien faire. Personne ne s’est opposé à cette décision. Nous avons mis en route une perfusion-cocktail à base de morphine. Le lendemain ….

La règle, en l’occurrence, non écrite, est de proposer aux proches l’arrêt des soins en fonction de la situation. Si un membre, ne serait ce qu’un refuse, nous respectons toujours cette décision.

Et c’est justement cette proximité du cas qui ne me parait pas pouvoir entrer dans un cadre proposé par une commission (dont je ne souhaiterais sûrement pas faire partie) car les spécificités du cas rendent compte de la complexité et ne permettent que très difficilement de le “cadrer”.

@ Madame Poppins

Merci d’avoir proposé ce très beau sujet de réflexion.

8)
alec6
, le 09.03.2009 à 09:55

Qu’est-ce que le progrès et où son les limites ?
Belles questions ! On peut traiter de son aspect médical, mais n’ayant aucune compétence particulière dans ce domaine…

En revanche je n’en conserverai que le bon sens qui préside (je le crois du moins) à l’exercice de la médecine : le ratio risque/bénéfice que l’on se doit ou devrait d’appliquer à toutes les facettes du progrès, que se soit dans le domaine spatial comme ce fut le cas sur ce site deux fois récemment, en médecine évidemment, et au final dans toutes ses expressions techniques de notre “monde moderne”.

Et là… on peut discuter de l’opportunité d’envoyer ou non des clampins sur Mars, de construire ou non des éoliennes ou des centrales nucléaires, de suivre tel traitement plutôt que tel autre, de rouler à 360 km entre Paris et Lyon, de prendre l’avion ou le train, la voiture ou le vélo et j’en passe. L’important étant de considérer un maximum de causes et de conséquences, de ne rien négliger en amont et en aval. Vaste sujet dont l’état actuel de la planète fournit une dimension certaine…

(Je reviendrai, j’ai du taf’ sur le feu…)

9)
Caplan
, le 09.03.2009 à 10:10

Ah, là là, Madame Poppins, s’il y a des limites dans la procréation, il n’y en a (presque) pas dans la création! ;-)

Milsabor!

11)
Tom25
, le 09.03.2009 à 10:35

QUI prend les risques, QUI en bénéficie, et QUI les assume ?

Cette question est à se poser dans le sujet de Mme Poppins, mais dans tous les autres comme le dit alec6.

12)
Philob
, le 09.03.2009 à 10:35

@ ¥sengrain

Hou là ! Malgré mon exemple personnel et médical, ma réponse elle, n’était pas du tout “pensée” pour les actes médicaux, mais carrément sur une nouvelle façon de gérer, gouverner le monde.

Je ne conçois pas une commission d’éthique derrière chaque médecin ou policier ou banquier; mais bien pour édicter des règles (lois) étiques bien en amont des actes.

je suis désolé de n’avoir pas assez été clair.

13)
ToTheEnd
, le 09.03.2009 à 10:51

Mes propos, provocateurs, ne sont que le reflet de la seule conclusion à laquelle je parviens aujourd’hui : parfois, l’Homme devrait mettre moins d’énergie à vouloir dépasser certaines limites et mettre davantage l’accent sur l’éthique de ses recherches.

Je ne suis pas très à l’aise avec des postulats qui offrent seulement la réponse A ou B. L’éthique n’est qu’un mot qui s’applique à des us et coutumes d’un échantillon de la population. Ce qui est “éthique” pour une commission suisse sera “herétique” pour d’autres je ne sais où.

Il y a définitivement des limites à poser mais visiblement, l’être humain n’aime pas trop ça. Si demain une vieille fille de 68 ans dit que maintenant elle veut des enfants et plutôt 8 que 1, il y aura certainement des gens pour répondre à cette détresse et délire. Par contre, tous ceux qui seraient pour dire à cette dame: “Non, c’est fini, laissez tomber et essayer de donner de l’aide à des enfants dans des orphelinas, ça serait déjà excellent.” On dira que ces gens sont contre la science, qu’ils ne comprennent pas la douleur de cette femme, etc.

Chaque cas “exceptionnel” redéfini la limite… je crains qu’il soit trop tard pour essayer de fixer une limite ou redéfinir les priorités.

T

14)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 10:56

Chaque cas “exceptionnel” redéfini la limite… je crains qu’il soit trop tard pour essayer de fixer une limite ou redéfinir les priorités.

Voilà pourquoi, qu’il s’agisse de médecine ou d’un autre sujet, il est extrêmement difficile de confier à un organisme le soin de régir nos conduites dans de tels cas.

@ Philob: si tu me lis ….

15)
pilote.ka
, le 09.03.2009 à 11:07

Un couple d’amis a eu 3 enfants, le dernier, un garçon est autiste, autiste “grave”. Après avoir été au plus proche de lui, après l’avoir soutenu tant et plus, vers l’âge de 13 ans, nos amis ont décidé de faire prendre en charge leur fils par un institution. Dans les mois qui ont suivi,le mari a fait un accident vasculaire cérébral et un infarctus du myocarde, tandis que la mère a déclaré une leucémie.

Tu es complètement farfelu pour employer un euphémisme.

Logiquement rationnellement on n’attrape pas une leucémie après un sentiment de culpabilité ni une crise cardiaque. Cela fait partie des dérives de la représentation de l’homme plutôt catholiques.

16)
pilote.ka
, le 09.03.2009 à 11:10

Tu es complètement farfelu pour employer un euphémisme.

Logiquement rationnellement on n’attrape pas une leucémie après un sentiment de culpabilité ni une crise cardiaque. Cela fait partie des dérives de la représentation de l’homme plutôt catholiques

17)
pilote.ka
, le 09.03.2009 à 11:13

Ça ne marche pas. Bon ben je ne recommencerai pas une 3è fois

18)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 11:15

@ pilote.ka

Que je sois complètement farfelu, je te le concède. Une faculté certaine d’improvisation m’a fait et me fait encore regarder avec suspicion par certains collègues.

Je ne te concède cependant pas que l’expression autisme”grave” est un euphémisme. Il existe différents degrés de gravité dans l’autisme relié au mode d’expression.

Quant à reprendre que “logiquement …” c’est exactement ce que j’ai voulu dire.

20)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 11:26

Je cite Ysengrain : « En matière médicale, on se base sur des résultats statistiques, puis on vérifie que le sujet entre dans les limites proposées. Un couple d’amis a eu 3 enfants, le dernier, un garçon est autiste, autiste “grave”. Après avoir été au plus proche de lui, après l’avoir soutenu tant et plus, vers l’âge de 13 ans, nos amis ont décidé de faire prendre en charge leur fils par un institution. Dans les mois qui ont suivi,le mari a fait un accident vasculaire cérébral et un infarctus du myocarde, tandis que la mère a déclaré une leucémie. »

Ah oui, c’est un résultat statistique, ça ? issu d’une expérimentation en double aveugle, sans doute ?

21)
Philob
, le 09.03.2009 à 11:36

On peut influencer la “bonne réflexion, la bonne décision”; rappelez-vous l’expérience de Milgram (i comme icare).

Il faut savoir que plusieurs étudiants qui avaient participé à cette expérience ont, plus tard, refusé de tirer sur des villageois Vietnamiens malgré les risques qu’ils encouraient. Ils ont tous dit que c’est grâce à l’expérience qu’ils avaient vécu “en laboratoire”, cette expérience les avait influencés dans ces moments terribles pour prendre la “bonne” décision.

Alors je pense qu’une éducation à la réflexion peut aider à prendre très rapidement le bon choix dans certaines situations urgentes même si le “bon choix” c’est la désobéissance.

22)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 11:48

L’interprétation psychologique (et notamment, psychanalytique), c’est la poubelle de la médecine. Ce sont des diagnostics par défaut : lorsque l’on ne sait plus où ranger, quand on est perdu, ça va là. Ce fut longtemps, précisément, le cas de l’autisme : à propos de ce syndrome, grave ou pas, beaucoup de bêtises ont été émises (à commencer par Bruno Bettelheim, personnage suspect, qui n’a pas manqué de talent littéraire).

23)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 12:02

@ 20 Kermorvan

Je me suis sans doute mal exprimé. C’était pour situer le point de vue médical que je citai l’aspect statistiques. La situation concernant ce couple d’amis sort bien entendu de tout exemple statistiques.

@ 22 Kermorvan

On nous demande très souvent, trop souvent d’expliquer la situation.

2 situations:

– 1 Va donc expliquer pourquoi la fracture du poignet n’est pas liée à un traumatisme mais au fonctionnement anormal de 4 microscopiques glandes situées dans le cou à quelqu’un qui n’a pas de connaissance médicale. Ce que je veux dire est que par principe et encore trop souvent, malgré des efforts de communication importants, nous sommes regardés comme coupables.

-2 quand un médecin répond “je ne sais pas”, il est immédiatement catalogué comme incompétent. Un exemple ? Pendant des années, l’ulcère de l’estomac qui récidivait a été considéré comme lié à un terrain psychologique spécifique. On sait maintenant que c’est une maladie d’origine infectieuse qui guérit avec 5 jours d’antibiotiques.

Pour le moment, et faute de mieux, l’interprétation psychologique, et notamment psychanalytique sont des outils médicaux admis dans tous les pays. Je ne vois pas pourquoi le mental ne serait pas malade et soigné comme tel.

Quant à dire, de manière superficielle que Bettelheim est un personnage suspect, ça me parait un peu immature. Il a fait avec dont il disposait à l’époque et n’était certainement pas malhonnête. il s’est trompé, un point c’est tout, et tant d’autres avec lui.

24)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 12:55

Je cite Ysengrain :   « l’interprétation psychologique, et notamment psychanalytique sont des outils médicaux admis dans tous les pays ». C’est faux. Il y a là une spécificité française. Voir, par exemple, le livre noir de la psychanalyse

27)
Tom25
, le 09.03.2009 à 14:19

pilote.ka #15, j’ai mal compris ou bien ? Je pense au contraire que si, une situation de stress peut engendrer une maladie. Tout comme la maladie peut tomber d’un coup lorsque le “poids” est retiré.
Je dis “je pense”, mais en fait j’en suis intimement convaincu.

28)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 16:32

@ 24 Kermorvan

(:-DDD): Nous ne sommes pas d’accord, sans aucun doute. Pour autant, qui est dans le vrai ?

Je fais simplement remarquer qu’utilisateur large de Wikipedia, il ne me viendrait pas à l’idée d’en utiliser une référence dont l’en-tête est chapeautée par “Cet article est une ébauche concernant la psychologie et la psychanalyse pour un sujet disons “sérieux”. Wikipedia a des limites que le bon sens doit respecter. Tu pourrais essayer ceci

A titre personnel, je fais part, comme je le fais ici, d’expériences ou personnelles ou professionnelles. Je sais ne pas savoir sur plusieurs sujets. J’essaie de ne pas affirmer péremptoirement, mais de suggérer que d’autres positions sont possibles.

Un jour, peut-être quand la neurophysiologie aura fait des progrès, tu seras dans le vrai, enfin … un peu plus qu’aujourd’hui.

29)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 17:13

Alors, continuons avec des références. En voici, sur le site de l’afis

Bonne lecture.

Au fait, ce que je conseillais, c’était la lecture du livre noir de la psychanalyse, hein! il y a pléthore de collaborateurs, voir la liste. Quand on sait que les héritiers de Freud interdisent l’accès aux archives…

30)
ToTheEnd
, le 09.03.2009 à 18:00

ysengrain: on est d’accord que c’est difficile, mais on ne peut pas laisser la responsabilité à un médecin voire un pharma… sans autre forme de limites et contrôles. Donc un “groupe”, même s’il ne sera jamais idéal, est tout de même obligatoire pour fixer des limites à certaines recherches.

Au fait, question perso/pro et un peu HS, es-tu pour ou contre l’arrêt volontaire de soin quand le cas est désespéré?

T

31)
Tom25
, le 09.03.2009 à 18:27

Ben il a répondu plus haut je crois.

Ce que je trouve triste dans ces problèmes, hormis le fait que ce soit un problème extrêmement grave bien sûr, c’est que ceux qui donnent leur avis cherchent plus à faire passer leur propre opinion qu’à réconforter ceux qui doivent prendre cette décision.

Mettre fin à la souffrance d’un condamné ? Placer un enfant autiste dans un centre de soin ? Qu’est ce que je ferai moi ? Je n’en sais rien. C’est comme de savoir si j’aurais planqué des juifs dans ma cave en 39-45 ou si j’aurais chercher à sauver mes fesses. On peut avoir une idée mais on ne saurait qu’en y étant confronté, et comme dit l’autre dans sa chanson, pourvu qu’on est jamais à faire ce choix.
Maintenant, quand on croise le chemin de ceux qui ont un choix à faire, je crois qu’on devrait se contenter de les réconforter dans leur choix, les déculpabiliser. Vu qu’il n’y pas de bon choix, ni de mauvais choix, autant leur dire qu’ils ont fait le bon.

32)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 18:28

TTE: ysengrain a répondu, plus haut: on réunit l’équipe et la famille, et si un seul est contre, on ne le fait pas.

C’est oublier qu’il y a un problème avec les lois (et tous ceux auxquels nous avons été confrontés dans le passé pour la contraception, puis l’avortement).

33)
ToTheEnd
, le 09.03.2009 à 18:42

Je n’avais pas vu la réponse… je suis à la bourre…

Et est-ce quelqu’un (parti, association ou je ne sais) va s’attaquer à ce problème de lois qui datent du siècle dernier et qui sont bâties autour d’un vieux bouquin qui ne peut même pas servir de cale?

T

34)
ysengrain
, le 09.03.2009 à 19:01

Au fait, question perso/pro et un peu HS, es-tu pour ou contre l’arrêt volontaire de soin quand le cas est désespéré?

À une époque, nous étions encore plus dans le brouillard. Les pratiques du temps n’impliquaient pas de réunion de groupe. Quand la famille demandait, proposait, interrogeait, il y a eu des situations où j’ai eu à décidé seul. Heureusement, ce n’est plus le cas.

Pour répondre encore plus clairement, je suis pour l’arrêt volontaire des traitements quand le cas est “désespéré” comme tu dis. C’est là, le point délicat, c’est de construire une argumentation qui permette d’arriver à la bonne décision. Elle implique aussi des aspects psychologiques, et dans la famille, et dans l’équipe soignante.

Enfin, il va de soit que l’arrêt volontaire des traitements doit se faire simultanément avec l’administration de “cocktails” à la fois suffisants en efficacité afin de déconnecter le sujet, tout en étant “sans violence”. Ce que je veux dire, c’est que je ne vois pas administrer une substance agissant dans un laps de temps très court. La dignité doit être partagée, à la fois par le sujet en fin de vie et par l’équipe soignante.

35)
Madame Poppins
, le 09.03.2009 à 19:20

Leo_11, le sort de cette jeune femme, italienne, m’avait en effet beaucoup touchée : comme il doit être difficile, pour un père, pour une mère, de devoir se battre pour obtenir le droit de ne pas maintenir dans une sorte de “pseudo” vie son propre enfant ! Et ce que je trouve particulièrement terrible, dans ce que tu nous relates au sujet de ta mère, c’est ce sentiment que la volonté du patient n’a guère été prise en considération….

Yip, la question est, juridiquement et théoriquement, clairement réglé : le patient doit obtenir toutes les informations pour pouvoir se forger une opinion, ce qui inclut “risques”, “avantages – désavantages”, coûts éventuels” (si non couverts par une assurance), “alternatives” notamment. Toutefois, et c’est pour ça que je fais apparaître le terme “théoriquement”, il est bien des situations où cette transmission d’informations n’est pas facile à donner (une femme qui est en train d’accoucher à 24 semaines malgré toutes les doses du monde de toccolytiques, difficile de lui donner toutes les informations). En outre, il existe encore des soignants qui estiment que leur notion du bien-être et du bien du patient recouvre forcément la vision que ledit patient a du bien-être…. ce qui n’est toutefois largement pas toujours le cas : il est des gens qui se sont vus proposer des chimios, à qui on a expliqué les risques de la chimio, les risques de la “non-chimio” et qui, après avoir pesé les pour et le contre, ont décidé de ne pas opter pour ce traitement. Alors que le corps médical était clairement en faveur de ce traitement.

Philob, je pense que médecine alternative et médecine classique ne s’excluent pas mais qu’il faut parfois choisir, notamment en cas d’accouchement. Et je suis ravie de lire que cette nouvelle consoeur se porte bien : je parie qu’elle se portera encore mieux lorsqu’elle aura du boulot. Le premier, c’est quand même quelque chose. Quant à la commission qui pourra se prononcer, n’est-ce pas déjà le cas en France en cas de demande d’interruption médicale de grossesse ? Il me semble que le couple doit déposer une demande devant une telle commission, qui a le pouvoir de refuser cette IMG. Du mois si je suis bien informée. Et, finalement, une question : les polyhandicapés dont vous vous occupez, sont-ils réellement majoritairement des anciens grands prématurés ?

A plus tard, la vallée des dinosaures, lecture avec Junior m’attend….

36)
Kermorvan
, le 09.03.2009 à 20:10

TTE : En Suisse, comme souvent, vous êtes très en avance sur la France ; en ce qui concerne la France, je donne le lien, plus haut (en 10), vers cette association qui s’efforce de faire changer la loi. Ça ne bouge pas vite, ici.

À partir des années soixante est apparu cette monstruosité qu’est la manière dont vous mourez dans un lit d’hôpital, avec des tuyaux partout, artificiellement prolongé, et souvent, jusqu’à ce jour, sans morphine. C’est là l’effrayante image de notre civilisation. Avec, en outre, sans le savoir, le risque de tomber sur un chef de service adepte de l’association des amis du professeur Lejeune.

Il y a eu pourtant de grands médecins catholiques, très respectés, Paul Millez par exemple qui intervint au procès de Bobigny

37)
Philob
, le 09.03.2009 à 20:29

une question : les polyhandicapés dont vous vous occupez, sont-ils réellement majoritairement des anciens grands prématurés ?

Je n’aime pas lire les dossiers des résidants avant de vivre un moment avec eux, j’aime les découvrir et je pense que c’est aussi leur donner une chance d’être vu différemment (j’aime pas les “dossiers” même pour tous les êtres humains). Et même après, c’est très rare que je lise de A à Z leur dossier, je m’intéresse à ce qui peux m’aider à les prendre mieux en charge; c’est étrange mais je n’ai jamais été intéressé aux causes de leur handicap, je vis au jour le jour ou j’anticipe un peu mais le passé ….. à part mon passé avec eux, c’est pas ça qui va changer quoique ce soit.

Mais je pense que j’aimerais lire une statistique à ce sujet, c’est pas inintéressant en soi mais pas très utile pour vivre avec eux.

Pendant 11 ans je me suis occupé d’adolescents à problèmes, là nous avions encore contact avec leur famille, leur entourage, et souvent il ne fallait pas chercher très loin la cause de leurs angoisses. Mais encore une fois, le lien familiale reste primordial malgré que souvent il a été à la source des problèmes, tout le monde peut changer même les parents. Cet optimisme me vient certainement de mon premier métier , jardinier, il faut d’abord avoir confiance à la graine, les soins viennent après.

39)
Madame Poppins
, le 09.03.2009 à 22:45

Ysengrain, d’où le “presque” mais bon, l’essentiel n’est pas là. Je n’ose imaginer la difficulté de vivre, au quotidien, avec un enfant autiste : l’amour le plus fort et le plus absolu ne suffit pas pour venir à bout des difficultés et je comprends tellement bien la douleur qu’a dû être la leur lorsqu’ils ont fait le choix de placer cet enfant en institution.

Quant à cette commission, comme je l’ai déjà écrit, n’existe-t-elle pas en France pour ces IMG ? Je pense que tu es bien mieux placé que moi pour infirmer ou confirmer. Peut-être toutefois entendais-tu autre chose par cette commission “non mise en place”.

Alec6, une appréciation risque/bénéfice est une chose, demander à des parents de faire un choix pour un enfant encore non né mais qui va naître avec beaucoup beaucoup d’avance en est une autre, l’émotionnel pouvant venir perturber le raisonnement. Et c’est d’ailleurs parce que l’amour peut être si fort, je crois, que des enfants s’en sortent malgré tout : la médecine n’est certainement pas tout dans la survie puis la vie de ces enfants qui se sont battus. Ainsi, on l’a vu avec les premières couveuses : le personnel médical avait reçu ordre de ne pas s’approcher, de ne pas stimuler ce petit être qui s’y trouvait. Une infirmière a désobéi et est allée leur parler, les toucher. Et là, “miracle”, il a été constaté que ces enfants-là se développaient mieux et plus rapidement que les autres…

Caplan :-)))))

Kermorvan, le sujet me tient à coeur, notamment pour des raisons professionnelles et j’avais rédigé ce <billet> il y a déjà un certain temps, ce qui me rappelle, damned, que je voulais lui donner une “suite”…

ToTheEnd, je suis entièrement d’accord : ce qui est éthique aujourd’hui ici ne l’est pas forcément demain ailleurs. Mais en cela, l’éthique n’est pas différente de la loi : ainsi, si pendant longtemps, en droit suisse du moins, les enfants nés hors liens du mariage n’avaient pas les mêmes droits que les enfants dits légitimes, il n’en va plus ainsi aujourd’hui, fort heureusement, parce que les mentalités ont évolué. Toutefois, une probable (et souvent souhaitable) évolution des moeurs “demain” ne doit pas empêcher une réflexion sur ce qui est là, maintenant, “éthique” et sur ce qui ne l’est pas.

Pilote.ka, je ne suis pas certain de comprendre la teneur de tes propos : “logiquement rationnellement on n’attrape pas une leucémie…” : si la maladie était une affaire de “logique”, il suffirait de vivre sainement, de manger ses portions de fruits et légumes et de pratiquer une activité sportive régulière. Mais il se trouve que certains, bouffant mal, trop gras, trop riches, buvant et fumant ne tombent pas malades et meurent à 92 ans dans leur sommeil tandis que d’autres, jeunes, vivant “raisonnablement”, meurent d’une maladie grave en l’espace de quelques mois. Ainsi, pour ma part, il y a quelque chose de “non rationnel” dans la maladie.

Et c’est bien le côté parfois “farfelu” d’ysengrain qui me fait apprécier le personnage ;-)

Kermorvan, je l’avoue, même si je lutte pour la liberté de conscience et de croyance, j’ai parfois du mal, en particulier avec les témoins de Jehovah…

Kermorvan, est-ce à dire que le “mental” n’a pas d’impact sur le corps ?

François, je ne sais pas si je comprends correctement ta très brève intervention mais j’ai envie de réagir sur la base de ce que j’ai ressenti : n’est-ce pas aussi une forme d’amour que de laisser partir un enfant qui est né beaucoup, beaucoup trop tôt ?

Tom25, je ne sais pas si j’en suis intimement convaincue mais je ne peux faire abstraction de ce que je considère comme un lien fort, entre l’esprit et le corps.

ToTheEnd, je pense qu’il est important, pour chacun d’entre nous, de se poser la question de “où est la limite en ce qui me concerne, lorsque c’est de moi qu’il s’agira” : les directives anticipées au sens de la loi sur la santé publique (vaudoise) permet leur rédaction et peuvent éviter, à l’entourage, de devoir prendre une décision très difficile.

Tom25, je pense que tu soulèves un point important : in abstracto, bien sûr qu’on aurait tous sauvé tout le monde. In concreto, personne ne peut savoir comment il réagirait. J’ai vu une amie se rendre d’un pas décidé chez son médecin pour demander un avortement : elle avait réfléchi, longtemps, dans tous les sens, était sûre de sa décision. Au dernier moment, lorsqu’elle a vu le petit coeur “clignoter” sur l’échographie, elle n’a plus pu. In abstracto, elle avait pris une décision; in concreto, elle a pris la décision inverse.

Philob, je comprends et apprécie que l’être à prendre en charge ne soit pas un dossier mais il me semble absolument nécessaire, pour comprendre le parcours de la famille, de savoir ce qu’il s’est passé, non ? Un soignant au sens large n’aura certainement pas la même attitude face à une mère dont l’enfant est né gravement handicapé et une famille dont l’enfant est devenu gravement handicapé suite à un accident de la route, à une noyade etc. Enfin, c’est mon impression, peut-être est-elle fausse.

Merci pour vos échanges, vos expériences sur ce sujet délicat.

40)
ToTheEnd
, le 10.03.2009 à 00:51

ysengrain: merci. Bien que le sujet soit grave, je trouve que ça serait bien que tu parles du sujet d’un point de vue “interne” si j’ose dire. Malgré les progrès qui ont pu être fait, je trouve que nous n’avons pas encore atteint un point satisfaisant pour le patient (et c’est tout de même lui qui est le plus concerné). Enfin, ce n’est qu’une impression…

Suisse, comme souvent, vous êtes très en avance sur la France ;

Ahahahah… mouais… c’est vrai qu’on n’a plus de parti communiste depuis 1940 et que les syndicats sont minoritaires… (humour)

MP: et bien vu qu’on repousse sans cesse les limites… ça me paraît donc compliqué (pour ne pas dire impossible) d’établir une limite. De plus, la question “la limite de ce qui me concerne” est vite dépassée par ce qu’on imagine et ce qui arrive… c’est assez différent.

T

41)
Kermorvan
, le 10.03.2009 à 01:52

TTE, vous connaissez la plaisanterie: Dieu ne se prend pas pour un réanimateur.

42)
ysengrain
, le 10.03.2009 à 08:03

Bien que le sujet soit grave, je trouve que ça serait bien que tu parles du sujet d’un point de vue “interne” si j’ose dire. Malgré les progrès qui ont pu être fait, je trouve que nous n’avons pas encore atteint un point satisfaisant pour le patient (et c’est tout de même lui qui est le plus concerné)

Que veux tu dire ? que j’écrive “publiquement” ce que tout le monde sait déjà pratiquer; j’entends raisonnablement pour le moins mauvais confort possible du patient ? Sois plus précis dans ta requête, j’aviserai. Je rappelle qu’on est en terrain glissant.

Concernant le “point satisfaisant pour le patient” je fais 2 commentaires

-1 bien qu’ayant pratiqué la réanimation, je ne suis pas réanimateur

-2 je ne me suis JAMAIS vu reprocher a posteriori par un membre de la famille que la pratique du service ait été inadaptée. Ce que je veux dire est que rien, en France, n’est légalisé, codifié. Notre si cher (dés)ordre des médecins n’a de cesse de nous bassiner avec de grandes phrases, qui incluent toujours le mot “dignité” mais qu’en fait de mise en place ils sont assez peu chauds, sans doute parce que c’est extrêmement difficile: c’est la position défendue ici.

Enfin, pour répondre à la “limite”, les non médecins/non soignants n’ont pas la connaissance “objective” des faits mais une perception de la situation perturbée par les affects; il faut donc que l’équipe soignante établisse une relation de confiance avec la famille, explique, ré explique et au plus vite informe la famille que les gestes de soins n’iront pas au delà des connaissances.

43)
Matkinson
, le 10.03.2009 à 11:41

Clair qu’on est en terrain glissant, tellement ça touche aux convictions profondes de tout un chacun..

En ce qui me concerne, ce qui m’a toujours un peu surpris (et choqué), c’est la position de l’Eglise dans des cas comme la jeune femme italienne il y a quelques semaines. Ils disent en gros : “hors de question de débrancher, c’est le bon dieu qui décide qui vit et qui meurt, pas les humains.” Sauf qu’après 17 ans de respirateur, il faut croire que c’est plutôt l’inverse qui s’est passé et que c’est plutôt grâce au respirateur “made by human beings” qu’elle n’était pas décédée. Si on doit suivre la logique jusqu’au bout, à ce moment-là on débranche et on laisse le bon dieu décider. Forcément ça va pas toujours dans le sens souhaité. Moi j’y vois comme un paradoxe dans l’argumentation de l’Eglise, pas vous ? Ca me hérisse déjà pas mal à la base, mais quand je vois qu’en plus, des élus en font une question d’ordre national au Sénat afin d’empêcher un événement d’ordre PRIVE, ça me met hors de moi.

Il me paraît évident que ce genre de cas est tellement centré sur la trilogie “patient / équipe soignante / entourage” qu’à mon avis, toute idée de commission d’éthique ou autre qui pourrait statuer en la matière me semble vouée à l’échec. Comment un “sage” d’une quelconque commission pourrait décider en connaissance de cause sans même connaître par lui-même l’historique d’un patient, son histoire, celle de sa famille, les relations entre cette famille (ou entourage plus largement) et ce patient, etc. ? Non franchement, je ne vois pas.

44)
alec6
, le 10.03.2009 à 15:01

@ M’am Poppins : Je me suis mal exprimé, mais je voulais dans mon intervention mesurer les actions de l’homme, son goût prononcé pour le “progrès” (toujours plus vite, plus haut, plus loin, plus longtemps) à l’aune du “ratio risque bénéfice”.

Ratio appliqué en médecine si je ne m’abuse pour juger par exemple de l’opportunité à vacciner sachant que tel vaccin peut dans certaines conditions entraîner de graves problèmes pour certains, mais dont les effets recherchés (protéger une population d’une affection microbienne particulière) seront bénéfiques à une majorité d’individus. Ainsi on peut risquer la vie statistiquement de un pour mille (suite à une allergie au vaccin par exemple) si, statistiquement encore on est certain de sauver la vie de 90% des gens qui auront été vaccinés alors que sans vaccination peut d’entre eux auraient survécu…
Donc les risques existes, ils sont faibles, mais le bénéfice global est énorme. On peut discuter ensuite de l’opportunité de continuer à vacciner si une maladie (la variole par exemple) est pratiquement éradiquée de la planète, auquel cas le bénéfice de la vaccination est nul. On cesse donc de vacciner.

Je pense qu’Ysengrain serait plus disert sur ce sujet qu’il connait forcément mieux que moi !!

La discussion s’est orientée vers le médical, alors que je pensais à l’aspect global du problème “Progrès/Limites”. Ainsi, Jancovici dans sa défense du nucléaire, se base sur ce ratio pour mettre en quelque sorte les pieds dans le plat des anti nucléaires, en préférant conserver des centrales voire en en construisant de nouvelles, plutôt qu’en les fermant, ce qui nécessiterait de remplacer un type de production par un autre, qui lui est bien plus problématique en terme d’environnement et de santé publique… en l’occurrence le charbon.

Qu’est-ce que je risque objectivement en construisant un centrale nucléaire vs que risqué-je en lui préférant une centrale au charbon… en toute objectivité encore.

On peut en discuter et polémiquer… cela nous met en prise directe avec le problème de progrès et de limites… L’aspect médical n’en est pas un moins bon exemple, bien sûr.

45)
Madame Poppins
, le 10.03.2009 à 15:19

alec6, merci pour tes précisions, désolée d’avoir compris de travers : quand on me donne un exemple aussi parlant que les vaccinations (le quotidien de certaines de mes collègues), je pige tout de suite mieux ! Et oui, il faut se poser la question du risque / bénéfice et la récente “épidémie” de rougeole le confirme encore….

46)
ysengrain
, le 10.03.2009 à 16:56

Éternel problème que celui du rapport bénéfice/risque. Plusieurs exemples peuvent être choisis:

les voyages en avion, grands “serviteurs” de nos besoins de voyage, mais un A 380 dépense 17 tonnes de carburant à l’heure et je ne sais pas calculer le CO2 émis par personne transportée.

Les effets indésirables des médicaments

Le vin, un grand vin, c’est un bonheur … mais un peu trop de grand vin ….

etc…

47)
ToTheEnd
, le 10.03.2009 à 22:47

ysengrain: je me suis mal exprimé… quand je suggérais de que tu écrives quelque chose, je ne parlais pas des commentaires mais en thème principal… comme humeur.

T

48)
ysengrain
, le 11.03.2009 à 08:48

TTE: je le savais que ça arriverait, un jour.

Je vais y réfléchir

49)
CHD
, le 12.03.2009 à 00:54

Quelque part ceci me rappel le triage effectué en période de guerre ou de catastrophe (ou simplement restriction de budget et de personnel ?). Enfin j’imagine que l’on ne se lance pas dans une carrière médicale sans s’être préparé mentalement à devoir affronter un jour ou l’autre la responsabilité de mettre un agonissant dans la catégorie “exceptant” et de passer directement au blessé suivant. En tant que secouriste (exploration spéléo) j’ai déjà vécu des situations nécessitant pas mal d’engagement personnel, mais ça je crois que je n’aimerais pas du tout (du moins après coup, car lorsque l’on est pris dans l’urgence des événements on marche beaucoup à l’intuition et c’est plutôt au moment du débriefing que c’est le plus dur à encaisser).

50)
levri
, le 16.03.2009 à 18:51

Les commentaires se sont résolument orientés vers les pratiques médicales, repousser toujours plus loin les limites de nos connaissances sur le phénomène de la vie ne me pose aucun problème, et il ne semble pas qu’il en était question ici, le “blocage” semble se situer au niveau de la mise en pratique des connaissances acquises. Est ce parce que nous détenons une connaissance que nous devons systématiquement la mettre en pratique ? le sujet est complexe et mériterait d’être traité dans un cadre moins général, globalement il me semble qu’il y a trop souvent confusion entre “sensibilité” et “sensiblerie”, ce qui empêche le détachement objectif nécessaire à toute prise de décision importante, si la technologie existe nous avons une fâcheuse tendance à l’utiliser avec acharnement.

Par exemple, les techniques existent pour déterminer très tôt les risques de naissances d’enfants “anormaux”, combien vont choisir d’avorter et essayer ultérieurement d’avoir un enfant en bonne santé (ou adopter) et combien vont faire le choix d’utiliser des techniques sophistiquées afin de mener la grossesse à terme, quels qu’en soient les risques ?

Pour revenir au général, ce besoin d’aller “toujours plus haut, toujours plus loin, toujours plus vite” est tout à fait honorable si on en reste au niveau personnel, le dépassement de ses possibilités et la recherche de la perfection sont des buts louables s’il en est. Lorsqu’on pense avoir atteint la plénitude, qu’on refuse le changement et qu’on ne trouve plus de raison pour chercher à évoluer d’avantage, on commence à mourir !

Cependant, si on en vient à privilégier le dépassement de l’autre au dépassement de soi, ce besoin “d’aller plus loin” peut être discutable et mener à des excès dont certains comme le dopage ont été évoqués ici, mais il faudrait aussi parler de l’aspect “guerrier” de certains sports qui au départ n’étaient que des jeux.

Au niveau de nos connaissances, il faut distingue la recherche scientifique pure, qui est estimable, de la course effrénée à la nouveauté “technologique” qui n’est qu’une variante de la course à la consommation.

Lorsqu’on veut passer du personnel au général et de la théorie à la pratique, comme l’a dit alec6, plutôt que d’appliquer la fuite en avant sans discernement nous devrions avoir une réflexion autre qu’à court terme et en tenant compte du ratio risques/bénéfices … “Science sans conscience n’est que ruine de l’âme”, comme l’écrivait l’auteur du Pantagruel.

J’écoute Quote Unquote de Mr. Bungle sur l’album éponyme