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Musique, respect, et grosse tête

Je me suis fait traité de grognon, ici, il y a quelques temps … et bien, ça ne va pas s'arranger.

Je vous ai dit à plusieurs reprises ma passion pour certaines musiques, et leurs interprètes. Aucun interprète n'a depuis plus de 50 ans généré en moi d'agacement,  de sentiment de colère. Mais ça y est, j'y suis.

Bien sûr, certain interprète ne trouvera pas grâce à mes oreilles, pour insuffisance technique ou conception erronée, voire de l'indifférence.

Un exemple, vous voulez un exemple ?

Je pense qu'un pianiste doit faire des efforts gigantesques pour jouer la musique, disons, précédant Mozart. La responsabilité est double et revient, aujourd'hui

à la conception des pianos modernes: les cordes sont croisées et ne permettent pas l'expression de la polyphonie.

à l'interprète dont la formation n'a pas abordé la compréhension de la langue adaptée à la musique jouée.

au tempérament d'accord, uniforme sur les pianos modernes et résolument, absolument, pas au clavecin ou au clavicorde. Quelle que soit la tonalité jouée au piano, la "couleur" du rendu ne varie pas.

Écoutez ici un extrait d'une conférence De Robert Levin, professeur de musicologie à Harvard

L'exemple d'interprète, pianiste, qui a tout faux, est à mes oreilles Angela Hewitt qui a beaucoup bâti sa carrière sur des exécutions - mettez le sens que vous voulez à ce mot - de pièces de Johann Sebastian Bach, et je tais, par simple respect, ses cuisines des oeuvres de François Couperin.

En clair, je n'aime pas, du tout, du tout. Comme dit Monsieur de Sainte Colombe au jeune Marin Marais dans Tous les Matins du Monde: "Monsieur vous faites de la musique, mais vous n'êtes pas musicien." Si vous remplacez Marin Marais par Angela Hewitt et Monsieur par Madame …

Après ceux qui ont - à mes oreilles, hein ? - tout faux, il y a ceux qui n'ont pas de respect pour les oeuvres jouées. C'est le propos du jour.

Attention, je sais, que je mets les pieds en terrain glissant.

Tant pis, je me lance.

J'ai assisté à des dizaines de concerts, entendu plusieurs centaines de diffusion radiophoniques, assisté à des dizaines de répétitions, voire de sessions d'enregistrement. J'ai à chaque fois, entendu, le "petit truc" qui révèle la présence humaine, l'imperfection … la fragilité. En quelque sorte, sans pour autant considérer que la rencontre de l'oeuvre musicale et de l'interprète - même un orchestre - puisse être un combat, il me parait qu'en tout moment de l'exécution, l'oeuvre prime, règne, en une sorte de perfection intouchable, et que quelles que soient les propositions de l'oeuvre, l'interprète doit rester à la place que l'oeuvre voudra bien lui réserver et enfin, last but ot least, rester l'intermédiaire entre l'oeuvre et l'auditeur.

Si je me réfère aux interprètes de mon panthéon personnel, le tout premier qui reste encore plus de 30 années après sa disparition, l'illustration de ce qui précède est Alfred Deller dont la voix "si fragile" révélait l'immense humanité; en goûtant les mots des "songs" il donnait une inflexion charnelle aux oeuvres et donc…

Sigiswald et son frère Wieland Kuijken m'ont toujours paru respecter les oeuvres. Sigi explique cette position dans un livre titré Bleib bei uns Bach (que vous aurez sans doute un mal de chien à trouver). Je range dans ce même tiroir, leur claveciniste de toujours Robert Kohnen

Jordi Savall et peut-être, plus encore, son épouse disparue Montserrat Figueiras dont la voix était chair: son lamento d'Arianna de Monteverdi

Reinhardt Goebel et son merveilleux Musica Antiqua Koln. Reinhardt a toujours su "maintenir en laisse" sa technique foudroyante afin de servir l'oeuvre et non sa gloire personnelle

Philippe Herreweghe (que j'ai vu pleurer au cours d'une répétition dans la chapelle du lycée Henri IV, de la Passion selon Saint Mathieu de JSB en Mars 1980, tant il était gagné par l'émotion -  le concert a eu lieu le 15 Mars 1980 en l'église Saint Étienne du Mont et reste encore incandescent 36 ans après).

Paolo Pandolfo tient une place particulière: il magnifie par son talent d'exceptionnel interprète toute oeuvre, mais reste "à genoux et tête découverte" devant l'oeuvre. Essayez de dénicher son Tobias Hume, vous comprendrez.

Monsieur Gustav Leonhardt exemplaire d'humilité en toute circonstance

…et tant d'autres

J'étais tranquille depuis … je n'imaginais même pas tout ce que j'ai écrit ci-dessus jusqu'à ce que j'entende une nuit d'insomnie les Variations Goldberg jouées par Andreas Staier au cours de l'intégrale "Les As du sautereau".

Le contexte: En Mars 2014, à la Cité de la Musique a eu lieu un grand raout autour de JS Bach: l'intégrale de sa musique pour clavecin, donnée jour après jour par une vingtaine d'immenses clavecinistes venus du monde entier. Bien entendu, le résultat est stocké dans mes disques durs.

Et bien, je suis vite revenu à Ysengrain, parce que le comte Kayserling avec cette interprétation là, ne se serait sans doute jamais endormi !! (heu ... moi non plus). Staier n'était plus claveciniste mais boulanger: le nombre de pains est hallucinant. Il avait ouvert une boulangerie. J'entendais des variations Goldbrot de Johann Sebastian Bäcker!!
Outre les pains, cet animal est d'une raideur à la fois complexe et inintelligible. Il joue certaines variations à un tempo hallucinant - pseudo virtuosité gratuite - donc il se plante.

Je me dis que Staier n'était pas dans un bon jour.

Quelques temps après, j'entends une """""i-n-t-e-r-p-r-é-t-a-t-i-o-n""""" du fandango du padre Antonio Soler par Staier. Le début jusqu'à la mesure 15 est joué avec un peu de manièrisme -ça fait couleur locale de la cour du Roi d'Espagne ? Puis débutent des ornements arrivés là sans raison, tout au moins inappropriée à mon oreille. Et soudain, sans que la partition ne l'indique, sans que les usages d'interprétation ne l'admettent, survient une crise épileptique, je crois que Staier a du se mordre la langue (signe de base de la crise épileptique), la mesure n'est plus respectée, les ornements pleuvent dru, bref le padre Antonio Soler peut redevenir moine, il sera plus isolé de ce monde là, celui de Staier. Si on y ajoute un enregistrement affublé d'une réverbération totalement indigeste, travestissant et trahissant et l'instrument et l'oeuvre, le tableau est complet, l'oeuvre passe loin, loin derrière Staier, ses maniérismes, ses variations épileptiques de tempo… Beuaarkk  !!

Staier ne joue pas ici le fandango de Soler, il fait une variation de Staier d'après le fandango de Soler, un peu comme Ferruccio Busoni a réécrit des oeuvres de JS Bach.

Je me suis donc interrogé sur cette évolution de Staier.

Sa carrière débute vraiment, en 1983 quand Reinhardt Goebel cherche un claveciniste pour Musika Antiqua Koln (MAK) succédant à Henke Bouman, disparu dans un ashram aux Indes.

Le contexte de l'époque a donné une immense notoriété à cet ensemble. Il est composé d'un escadron de virtuoses exceptionnels, sous la poigne incontestée (et inconstestable) de Reinhardt … qui a donc besoin d'une pointure. Reinhardt permet à Staier d'enregistrer dans le groupe ce qui reste encore aujourd'hui iconique dans la production discographique

L'art de la Fugue de JS Bach BWV 1080

Les concertos brandebourgeois 

Tafelmusik de GP Telemann

… entres autres

J'ai le souvenir qu'au sein de notre groupe de baroqueux, il se disait que Reinhardt avait amélioré la qualité de la basse continue et des passages solistes par le recrutement de Staier dans le groupe.

Staier ne reste que 3 ans avec MAK, mais quelle production !!

Et pourtant, dans une interview de 2005, il prononce ces mots, parlant de Reinhardt. Plus loin dans l'interview, il dit clairement que les brandebourgeois, acclamés unanimement dans le monde entier sont ratés. Enfin il juge que MAK sous la direction de Reinhardt ne sait pas jouer la polyphonie.

Le moins qu'on puisse dire …: le mérite des opinions extrêmes est de permettre la discussion.

Au cours de cette interview, il raconte que le lendemain du jour où il a annoncé à Reinhardt qu'il ne continuerait pas l'aventure avec MAK, il est recruté comme professeur à la prestigieuse Schola Cantorum. Autrement considéré, le claveciniste inconnu de tous en 1983, intègre, comme professeur, un des plus hauts lieux d'enseignement de la musique baroque au monde, après avoir passé 3 années avec un ensemble de référence. Il devient après la fréquentation de Reinhardt le collègue de ces maitres.

Aucun doute que cette nomination est indiscutable, mais la mise en perspective de cet élément avec le résultat obtenu

quant aux variations Goldberg données au printemps 2014

dans l'enregistrement calamiteux du fandango de Soler

me fait dire que la fragilité sous jacente de Staier existe, mais qu'on ne l'entend pas du tout dans son jeu musical.

Pour terminer, je vous livre sa version de la "marche turque" n° 11 en la majeur, K. 331 de Mozart.

Vous, je ne sais pas, mais cette esbroufe m'exaspère par l'absence totale de respect de l'oeuvre.

25 commentaires
1)
Lutoblerone
, le 19.07.2016 à 07:14

Merci Ysengrain pour nous faire partager non seulement ton immense savoir sur la musique baroque, mais surtout cette passion qui t’anime et que tu sais transmettre. Apparemment il est chez certains interprètes une façon de vouloir s’imposer face à l’oeuvre qui t’incommode (doux euphémisme). Terrain glissant peut être, mais ta passion sincère et tes ressentis sont tout à ton honneur, et ma foi à te lire et écouter tes liens on ne peut qu’abonder dans ton sens. Le vrai génie réside dans l’humilité qui seule, adossée à la technique, permettra de faire revivre les émotions que l’oeuvre est à même de nous apporter. Encore merci pour nous rendre vivante et accessible ta musique baroque.

2)
Gilles Theophile
, le 19.07.2016 à 08:21

Voilà bien un domaine qui m’est totalement inconnu, et dans lequel je suis un ignare et un inculte complet, mais je dois dire que j’ai été sidéré en lisant ce texte, et en apprenant que la bouillasse et l’artificiel ne sont pas l’apanage de la musique de consommation.

Je croyais que le classique était un modèle de pureté et de rigueur absolue.

Étonnant.

3)
djtrance
, le 19.07.2016 à 08:21

J’abonde totalement en ton sens ysengrain, c’est un peu comme au snooker avec l’arrivée de l’Asie en masse dans les compétitions: certes, cela ouvre le cercle de celle-ci (qui était trop restreint) mais ces joueurs sont « programmés » pour empocher les billes, limite dès leur naissance (certains dès 3 ans) et ça donne certes la chance de voir des jolies choses mais alors, pas un sourire, pas un échange avec l’adversaire du joueur, rien de gentleman… Pas l’esprit snooker quoi!

4)
quark
, le 19.07.2016 à 09:50

Je n’ai pas eu le temps de tout écouter, à part la Marche Turque.

Eh bien, je pense qu’on devrait interdire à ce bouffi prétentieux de continuer à commettre pareils crimes.

5)
quark
, le 19.07.2016 à 12:21

@Hi-Phil

J’ai chez moi du matériel haut de gamme (essentiellement les enceintes). J’ai écouté la Marche Turque du bouffi dans un casque de mauvaise qualité. La question n’est pas là. Ce type dénature ce qu’il prétend interpréter. Il assassine Mozart ! On aboutirait à la même conclusion en l’écoutant sur une cassette, en MP3, voire sur un 78 tours.

Quant aux musiques plus actuelles (j’en écoute aussi), je ne vais jamais aux concerts. La plupart de ces soi-disants artistes ne savent en réalité pas jouer. Et si je ne retrouve pas exactement ce qui a été peaufiné en studio après moult prises et raccords des meilleures, bin ça le fait pas.

En ce sens, tu as raison, je suis très intolérant. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas attendre des musiciens modernes la même maîtrise que des classiques.

6)
lvme
, le 19.07.2016 à 13:46

Mais qui attend quoi des musiciens « de l’époque » ?
Qui sait comment était joué tel ou tel mouvement ?
Qui était collé, voir scotché aux partitions comme on voudrait l’être aujourd’hui ?

Loin d’une lecture littérale ou sémantique des partitions, je m’efforce, personnellement, de trouver une émotion non scientifique dans l’écoute de la musique (qui ne parle donc pas à mon intellect…. mais en ai-je ?…)

Un exemple qui me vient en tête, le requiem de Jean Gilles par Herreweghe est d’un ennui total pour moi, alors que la version Niquet m’entraine là ou je ne vais pas spontanément.

Le tout sur du matériel d’entrée de gamme Cambridge+Triangle mais qui me rend heureux.

Totu cela est-il trop subjectif ? Sans doute.

7)
quark
, le 19.07.2016 à 14:47

@PhB

C’est rigolo, j’aime bien la parodie et je ne suis pas contre.

Seulement voilà: il ne maîtrise absolument pas la mélodie, il n’est même pas dans le ton, suffit d’écouter le piano derrière lui.

À la limite, ce qu’il fait, je le fais aussi. Sans problème. Y a pas de performance.

En somme, tout ce qui reste, c’est que c’est rigolo. C’est un clown.

8)
François Cuneo
, le 19.07.2016 à 14:58

Ce que je sais, c’est que les liens vers les enregistrement de Music Antiqua Köln sont absolument géniaux.

Je m’en régale depuis dimanche, quand tu m’as averti que ton article était disponible.

Pour Steiert, j’ai écouté la marche turque, je n’aime pas. Mais bon… À l’époque, Glen Gould était adulé ou détesté, et il est resté un Dieu pour certains.

Alors je ne sais pas… peut-être est-il en avance sur son temps, peut-être est-il un maniéré, je ne sais pas.

9)
quark
, le 19.07.2016 à 15:47

@Hi-Phil

Je ne pense pas être maniaque, je suis même un peu «bordélique».
Je ne suis pas dogmatique, je n’ai ni ne respecte aucun dogme.
On m’a souvent dit que j’étais perfectionniste, c’est vrai et je le reconnais volontiers.

Je ne suis pas un génie de la musique et je ne prétend rien de ce dont vous me soupçonnez. Je n’ai pas de matériel haut de gamme, uniquement les enceintes, car selon moi elles comptent pour au moins 50 % dans le résultat acoustique final. Si quelqu’un changeait subrepticement l’ampli de votre installation, vous risqueriez de ne pas vous en apercevoir. Si c’était les enceintes, vous crieriez au voleur dans les 3 secondes.

Je sais pertinemment que le local d’écoute est tout aussi déterminant et qu’en l’occurrence, je n’ai pas un cubage suffisant. Mais je n’ai pas les moyens d’habiter dans des salons élyséens.

Au final, je ne renie rien des avis que j’ai exprimés. Mais ce ne sont que mes avis et non parole biblique. Y a pas de quoi en faire tout un fromage.

10)
François Cuneo
, le 19.07.2016 à 16:10

Alors quark, détrompez-vous!

L’ampli a énormément d’importance. Comme vous je croyais le contraire jusqu’à il y a deux ans. Mais désormais, ce composant de la chaîne, je le respecte autant qu’un autre. Pas plus, pas moins.

11)
quark
, le 19.07.2016 à 16:43

@ François

Ayant eu un magasin spécialisé en Hi-Fi suite à l’obtention de mon CFC d’électronicien en radio-TV, ayant équipé un salon d’écoute avec un banc de switch spécial qui m’a coûté la peau des fesses, ayant testé sur des centaines d’auditeurs leur capacité à distinguer des amplis Harmann Kardon, des Macintosh (eh oui), des Fisher ou des Quad, des enceintes Cabasse, Tannoy, JBL (que tout ça est vieux…), bref, j’ai tendance à ne pas y croire, même s’il y a longtemps que je n’ai pas eu l’occasion de comparer des amplis.

Parce qu’enfin, ce n’est que de l’électronique. Ça n’est pas censé apporter une couleur quelconque au son. Et si c’est le cas, alors y a un lézard. Un ampli, son boulot c’est d’amplifier et rien d’autre. Un signal à l’entrée, le même amplifié à la sortie. Pour le reste, un rapport signal-bruit décent et une courbe de réponse plate, c’est le minimum légal.

Alors que les enceintes, c’est du bois (un certain bois), du bass-reflex ou non, un nombre de voies variable, des membranes à dôme ou pas, de tel ou tel diamètre, des suspensions comme ci ou comme ça, des filtres plus ou moins bien calculés. Il n’y a pas deux enceintes qui ont un son comparable, il y a trop de variables, c’est pas possible.

À l’époque (mais flinguez-le, le vieux…) le seul autre élément de la chaîne auquel il fallait apporter plus d’importance que ne le faisait le public non averti, c’était la cellule de pick-up.

Maintenant, je sais que tu es passé à l’ampli à lampes. Alors oui, le son dans ce cas-là n’est pas le même (dynamique générale et fidélité des aigus). Mais on ne va pas relancer ce débat.

12)
kalvin
, le 19.07.2016 à 17:32

Suggestion : écouter les interprétations au pianoforte de Arthur Schoonderwoerd. Simplement historique. Pour entendre de la véritable polyphonie!

@Ysengrain: oui Arthur S. est très sympa et superbement délicat dans son jeu. Rare, en fait à déguster si possible en « live ».

13)
ysengrain
, le 19.07.2016 à 17:59

@ HiPhil: je ne crois pas qu’une interprétation – l’interprète nous dit le contenu de l’oeuvre – passe par la qualité du matériel d’écoute.
En second lieu, je ne suis pas intolérant: j’ai basé mon argumentation sur des faits. Écoute les paroles de Staier, remet les dans le contexte.
Le curseur de l’ouverture d’esprit. Staier est un homme de mauvais goût et j’ai pris la précaution d’écrire « à mes oreilles… »

@ Ivme: on ne sait rien des interprétations d’époque. « On » a lu des traités et utilisé la « méthode analytique ».

@ HiPhil et Ivme: l’émotion n’est ni scientifique ni non scientifique. Elle est. Qu’il s’agisse de musique ou non, ça passe TOUJOURS par le noyau ventro-caudal du lobe frontal. Alors si une démonstration mathématique génère en vous une émotions, c’est tant mieux, mais ça n’a pas d’autre caractère que celui d’émouvoir.

@kalvin: Arthur Schoonedervoerd en plus d’être un exceptionnel interprète, c’est un homme délicieux.

14)
Dom' Python
, le 19.07.2016 à 22:00

C’est toujours intéressant de te lire! Même si je n’ai pas les moyens de te suivre dans ton argumentation. Je suis par exemple incapable de dire si l’interprète “respecte” une oeuvre ou non. Tout au plus puis-je déterminer si je suis touché ou non par ce que j’entends.

Angela Hewitt, par exemple, je ne connais pas. Je suis donc allé sur Qobuz pour y jeter une oreille. Le concerto italien… oui… je ne sais pas. Je saute à la plage 4 (Duet N°1) et là, je suis touché. Quelque chose se passe. Alors quoi? J’ai tout faux? Je pense que si j’étais avec toi dans ton salon et que tu me faisais écouter attentivement différentes versions, je découvrirais des trucs, je comprendrais ton point de vue, et, peut-être ainsi “éduqué”, je serais à même de faire des choix différents. Mais, comme tu prends la peine de le préciser, c’est “à tes oreilles”. Et malgré la pertinence de ton argumentation, j’apprécie cette précaution qui me donne le droit – que j’aurais pris de toute façon! – d’écouter avec les miennes, d’oreilles, et de vibrer différemment. (Cela dit, si tu habitais Genève, j’adorerais m’inviter chez toi pour une séance privée!)

Je te rejoins par contre complètement pour les Kuijken, Goebel, Figueiras (à qui je dois une de mes grandes tétanisations musicales avec El Cant de la Sibilla) et, naturellement Monsieur Leonhardt!

15)
François Cuneo
, le 19.07.2016 à 22:48

Hi-Phil, je pense vraiment que l’on peut juger une oeuvre complètement indépendamment de la chaîne Hi-Fi.

La musique peut s’écouter sur n’importe quoi, et l’on ressentira malgré tout ce qu’a voulu faire passer l’auteur.

Sans compter que les preneurs de sons (et c’est bien dommage pour nous, pas pour la plupart des gens) commencent à tenir compte des spécificité bas de gamme et de la compression.

À la limite, il y a des fois (pas en classique) où je me demande si c’est un plus d’avoir une chaîne de haute qualité.

16)
ysengrain
, le 20.07.2016 à 00:20

Bonnes écoutes, cher François.

Et moi ? Rien ? Avec tout le mal que je me donne

17)
François Cuneo
, le 20.07.2016 à 08:59

Maiaaaiieuuuuuh!

Bonnes écoutes ysengrain!:-)

18)
quark
, le 20.07.2016 à 09:36

Toujours matière à beaucoup de commentaires, ce genre de sujet.

Alley, quoi que vous écoutiez, quel que soit votre matériel d’écoute, l’essentiel est d’écouter. Et de prendre son pied. Bonne écoute à tous !

Et merci ysengrain pour cet article que j’ai bien apprécié. Vive les grognons !

19)
jdmuys
, le 20.07.2016 à 13:25

@ysengrain

merci merci merci encore une fois pour cet article. Je butine, je savoure, je déguste chacun de tes articles (avec leurs liens). Je suis moi aussi un « baroqueux », mais tellement moins érudit. J’ai découvert Deller, Kuijken, et bien entendu Christie que tu n’as pas cité cette fois ci, il y a bien longtemps, mais je suis si loin de ton érudition.

Pour mentionner un autre interprète, je n’ai jamais tellement aimé ce que fait David Fray de la musique de Bach. Qu’en pensez-vous?

20)
Argos
, le 20.07.2016 à 14:26

Ah comme je suis d’accord avec Ysengrain en ce qui concerne Angela Hewitt.
A propos de la marche turque, un petit détour chez le grand Fazil Say et qui doit sans doute songer hélas à quitter sa Turquie natale. Voici deux de ses versions de la Marche turque, la première, plutôt classique et là j’adore l’expression de son visage. https://www.youtube.com/watch?v=fzQbI58BzBo

et la seconde, très,très personnelle : https://www.youtube.com/watch?v=WWftABQV4Wk

Pendant longtemps les Brandebourgeois par Musica Antiqua Köln faisaient partie de mes disques de chevet. Je leur trouve aujourd’hui un tempo un peu trop rapide.
Et il arrive de me complaire dans le Bach d’Edwin Fischer. C’est du 78 tours, parfaitement enregistré par HMW.

Et je ne sais pas si j’ai évoqué ici le premier enregistrement stéréo d’un concert. C’était en automne 1944. Berlin croulait sous les bombardements pendant que Walter Gieseking et les musiciens de l’orchestre de la radio enregistraient le Cinquième Concerto pour piano de Beethoven sous la direction d’Arthur Rother. Au moment de la cadence du premier mouvement, on entend les tirs des batteries anti-aériennes et les musiciens ne se sont pas arrêtés de jouer. https://www.youtube.com/watch?v=EY7lvuVjjX4

Près de 150 ans plus tôt, Beethoven composait ce concerto pendant que les canons des troupes napoléoniennes bombardaient Vienne.

21)
quark
, le 20.07.2016 à 15:40

@Argos

Pour les Brandebourgeois de Musica Antiqua Köln, oui, je trouve aussi le tempo trop rapide. Je n’y ressens pas non plus l’émotion, la perfection auxquelles je suis habitué.

Je te recommande donc, si tu la trouves, l’interprétation du Berlin Philharmonic Orchestra, dirigé par Herbert Von Karajan, en 1980 (Deutsche Grammophon).

22)
ysengrain
, le 20.07.2016 à 19:35

@ jdmuys: David Frey est un pianiste. Il n’entre pas dans mon domaine de prédilection. À la rigueur, il jouerait du pianoforte, j’écouterais. Un piano n’est pas fait pour la musique et l’interprétation que j’aime.

Perso je pense pas grand chose de ce qui m’attire pas, ce qui m’intéresse dans l’immense foisonnement des arts, c’est de m’arrêter et passer du temps sur ce qui me procure de l’admiration, de la contemplation, etc. et de passer mon chemin sur ce qui m’attire moins sur le moment, quitte à revenir plus tard sur mes pas afin d’observer si l’œuvre déclenche chez moi quelque chose de positif…ou pas.

Ceci décrit exactement ma position. Sauf que je sais avoir l’esprit et les oreilles moins larges !!

Je te recommande donc, si tu la trouves, l’interprétation du Berlin Philharmonic Orchestra, dirigé par Herbert Von Karajan, en 1980 (Deutsche Grammophon).

Non, mais il me provoque ? J’en connais qui se sont retrouvés dans un champ au petit matin en compagnie de 2 amis venus témoigner.
Karajan !! est ce que quelqu’un peut me dire pour quelle(s) raison(s) dans son 3 ème enregistrement de la Passion selon Saint Mathieu, il y a 11, oui ONZE contrebasses ?

Allez, merci à tous. Je suis rassuré, l’esprit Cuk est bien vivant.

23)
Argos
, le 20.07.2016 à 22:44

Il se trouve, Ysengrin, que j’ai assisté en septembre 1973 à la Philharmonie de Berlin à la Messe en si de Bach dirigée par Karajan. Effectivement les contrebasses étaient bien présentes. Mais à l’époque, je ne trouvais pas ça si mal. Comme quoi les habitudes d’écoute peuvent se transformer profondément Et il me semble que la Passion selon Saint Mathieu de Mengelberg avec Karl Erb en évangéliste (enregistré pour la radio en 1939 avec un seul micro) est dotée d’une ferveur étonnante. https://www.youtube.com/watch?v=zayss_RBkj8.
Maintenant je me souviens d’une diffusion de la Tribune des critiques de disques sur la même Passion où Antoine Golea insultait Nikolaus Harnoncourt qui avait eu l’audace de s’éloigner de la vision traditionnelle de Bach. Un grand moment. Le plus grand moment étant bien sûr l’interprétation de Harnoncourt, alors révolutionnaire.
Karajan, ce n’est bien sûr pas dans Bach qu’il faut l’entendre. j’ai eu la chance lors d’un séjour à Vienne de l’entendre la même semaine dans une Chauve-Souris endiablée avec Erich Kunz dans un rôle parlé et ovationné plus que Karajan, et, quelques joue plus tard, dans Parsifal mis en scène par le maestro lui-même.
A la fin de Parsifal et aux entractes on n’applaudissait pas

24)
Dom' Python
, le 20.07.2016 à 23:34

Hi hi !
Quand j’ai lu la proposition de la version Karajan pour les Brandebourgeois, j’ai pensé que lorsqu’Ysengrain lirait ça il risquait d’exploser en vol.
Bon en revenant sur le site ce soir, je vois que l’auteur du jour semble avoir survécu. Me voilà rassuré.
Mais quand même, faites gaffe, quoi! ;-)

25)
quark
, le 21.07.2016 à 09:35

Comme je l’ai dit plus haut, je ne suis pas un génie de la musique. Et je n’ai donc pas la prétention de pouvoir indiquer ici, quelle que soit l’œuvre, l’interprétation qui devrait faire l’unanimité.

En outre, j’ai remarqué qu’une fois habitué à une certaine version, j’avais beaucoup de mal à accepter que l’on puisse la jouer différemment. La Sonate Au Clair De Lune, par exemple, je ne «tolère» que celle que je possède, sur un vieux microsillon, je ne saurais citer le pianiste, là tout de suite.

Mais… il vaut peut-être mieux que j’évite. Pardon ysengrain. Je relève malgré tout que tu casses ma suggestion avec un contre-exemple sans rapport.

PS: choisissons le pistolet. Avec nos yeux de vieux gâteux et un peu de chance, il n’y aura pas de dégâts…