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Cool Parano!

Voici le message que j'ai reçu de Monsieur Patrick Charmillot il y a quelques jours, suite à nos démélées avec Proteron. Vous verrez que ça vaut le détour!

En lisant les nombreux messages publiés en réponse à la ligne de défense adoptée par l'éditeur Proteron, je me suis souvenu d'un texte déjanté que j'avais écrit en mars 2001. Je l'avais imaginé après qu'un internaute eut expliqué, sur le défunt site Pommea, comment l'on pouvait, en tapant une séquence de touches, retrouver le numéro de série de son natel. J'avais adressé le texte à Mathieu Besson, qui l'avait publié sur Pommea.

Cool Parano

J'ai lu avec intérêt le développement de l'affaire Proteron. Très inquiétant. Il faut réagir. Je me permets d'ajouter ma contribution, qui permettra à vos lecteurs de mieux se prémunir d'intrusions dans leur vie privée. Moi, c'est mon four que j'ai mis à l'abri des pilleurs d'intimité. Dimanche soir, muni d'une masse et d'une barre à mine, j'ai atomisé les parois de mon four - de feu mon four. Toutes ces choses qu'on nous cache, je supporte plus. Dans un premier temps, la déception a été rude: pas trace de numéro de série. Mais je suis tenace comme une teigne. Lorsque j'ai rageusement attaqué ce qui restait du socle au marteau-piqueur, ah ah, victoire! J'ai découvert un feuillet. Il révélait le précieux numéro! Je l'avoue, d'abord j'ai eu comme un doute: le nombre, à 10 chiffres, était griffonné à la main, d'une écriture ressemblant à celle de mon installateur d'électroménager. Par ailleurs, le billet arborait le logo de sa raison sociale. Et puis, détail troublant, le numéro de série de MON four correspondait au numéro de téléphone de l'artisan. Ça m'a rendu perplexe. Mais, devant les débris du défunt, j'ai vite balayé tout soupçon. Pour quelle raison mon installateur, cet honnête homme, aurait-il insidieusement glissé son numéro de téléphone dans un nœud inaccessible de circuits électriques? Des numéros identiques, ça se trouve, non? Tout malicieux qu'il soit, le hasard, me suis-je dit, ne m'abuserait pas sur ce coup-là. Pervers, va! J'ai refusé de croire que le génocide de ma cuisinière avait été vain et ne m'aurait livré qu'un vulgaire numéro de téléphone. Manquerait plus que les objets, parés d'arrogance bête et de technicité croissante, nous plongent dans la confusion. Hé, méfiance, ne devenons pas paranos!

Aussi ai-je sagement planqué le précieux nombre secret à la cave, dans le petit coffre enterré là où vous ne saurez pas. J'y ai déjà logé les autres numéros de série que j'ai pu arracher à l'intimité secrète des ustensiles qui cernent mes déambulations quotidiennes. Je les ai contemplés avec fierté et ferveur. Apaisé, presque attendri. Celui de ma tondeuse à gazon (planqué dans le filtre à air que j'ai décalotté au burin), celui de ma machine à laver (extirpé du tambour après un lavage à sec à la nitro). Bien sûr, ça ne me fait que trois numéros. Mais je compte bien poursuivre mes investigations. Hier j'ai commencé à tronçonner mon piano, où je ne doute pas de trouver le quatrième numéro. C'est devenu une obsession onéreuse, le prix de la modernité. Mais ma quête est sereine. Demain je décollerai les touches à la hache, pour voir. Ces salauds d'accordeurs y ont sans doute planqué le Graal. Et déjà je lorgne méchamment du côté de mon Mac. Là, c'est plus vicieux, les mages qui accouchent des bidules maléfiques n'ont même pas pris la peine d'occulter le numéro de série. Je suis sûr que c'est un faux. Ils ne m'auront pas avec un leurre aussi grossier. Dès que j'aurai fini le piano, j'attaquerai l'ordino.

Ha ha, je me marre. Lorsque les monte-en-l'air me rendront visite, ils en seront pour leurs frais. Je disposerai de tous les codes qui me permettront d'interdire à distance toute utilisation illicite. De toute façon, la déception sera aussi grande que le butin risque d'être maigre, car jour après jour, de moins en moins d'objets fonctionnent dans mon habitation. Il n'y aura bientôt plus rien à dérober. C'est là sans doute le prix à payer pour préserver un zeste de confort d'esprit dans la modernité du troisième millénaire. En tout cas, pour moi, ça marche. Le sabordage de mon intérieur m'évitera de virer parano. La traque continue.

Et n'oubliez pas pour le four: sous le socle du four!

Patrick Charmillot

Si cet article vous a plu, je ne peux que vous conseiller de lire ou de relire une des autres productions de Patrick, cette fois se rapportant à la vie quotidienne d'un forum sur un site de votre choix, à vous de voir. Moi, je le relis quand je n'ai pas le moral, et du coup, ça va mieux.

2 commentaires
1)
an7re
, le 29.09.2002 à 12:55

J’adore ! C’est quasiment du Philip K. Dick…

2)
GUY
, le 30.09.2002 à 00:34

Moi, j’ai décortiqué la carte à puce de ma femme, mais je n’est pas trouvé le code!!!
Un monde fou fou fou…